Inspirer, expirer, inspirer, expirer. C’était donc à un rythme régulier de respiration que notre jeune amie tentait maladroitement d’avancer sans perdre son rythme malgré le point de côté qui la tenaillait depuis bientôt une bonne dizaine de minutes. Elle ne comprenait pas pourquoi elle l’avait attrapé. Elle avait pourtant l’habitude de marcher avec son sac contenant la majorité de ses affaires. Oui, Nelindë déménageait, mais ce n’était pas par choix. Son pas pressé sous sa robe mettait en avant la précipitation avec laquelle elle avait dû partir. Cela se voyait aussi à sa tenue, elle portait encore une longue robe nacrée descendant jusqu’aux chevilles, qu’elle se retrouvait forcée de soulever pour qu’elle ne la gêne pas.

Péniblement, elle avançait donc, sur les pentes ravinées des montagnes, ayant vue, si elle tournait la tête vers l’est, sur la pineraie calcinée. Bon, elle aurait pu prendre le sentier qui serpentait pour monter le long de la montagne, rejoignant ainsi le col et passer en Naturalia, mais rien à faire ! Elle ne voulait voir personne, ou du moins, elle ne voulait que pour compagnie de voyage que le btuit du vent dans les arbres ou les chants des oiseaux, rien de plus. Il était donc hors de question que notre elfe aux yeux vairons emprunte les sentiers battus ! C’était non négociable !

Si on voulait la rencontrer, il fallait d’abord la convaincre du bien-fondé de ses intentions. Ce qui n’était pas gagné ! De plus il fallait réussir à la débusquer, elle ne se présenterait pas à eux comme ça ! Ce n’était pas qu’elle voulait, au fond, elle voulait mettre fin à sa solitude. Mais elle n’y arrivait pas ! Les autres lui faisaient peur, dieu seul sait pourquoi…non en fait c’était logique, et cela remontait à sa marque dans le dos. De plus, les gens avaient tendance à lui vouloir du mal dès qu’elle déclenchait un orage par erreur ou qu’elle révélait une supercherie en touchant un objet…

Dame Elvélindë continuait ainsi de marcher, ne s’arrêtant pas pour manger, avec le temps, un repas tous les deux jours pouvait lui convenir, lui permettant de fuir plus rapidement. Et puis, en cette saison, trouver de la nourriture n’était pas forcément aisé De toute manière, dans une heure ou deux, par prudence, elle devrait s’arrêter pour se reposer. Ce foutu point de côté ne lui laissait pas une seconde de répit ! Mais elle ne voulait pas s’arrêter, aussi continuait-elle d’avancer….ou pas…

En effet, une simple inattention de sa part et voilà qu’elle dévalait désormais la pente sur les fesses, jambe sous elle, avant de se mettre à faire la culbute et d’avancer tête la première dans le ravin, sur les cailloux qui la blessaient, la meurtrissaient, puis vint le choc. Un choc terrible. Enfin, elle heurta le sol plat d’une vallée. Non, au paysage environnant, elle était retombée dans la pineraie calcinée. Houlà…elle avait dû en dévaler de la pente ! Elle jeta un œil vers le haut de la PENTE ; Son sac était à mi-chemin de la pente, coincé dans l’éboulis. Et zut…

Elle tenta de se lever, mais une douleur lancinante la prit dans le tibia…oh non ! Elle n’allait pas rester ainsi, à la portée de tous ! Non, elle devait partir ! Mais pas sans son sac ! Elle commença à ramper pour remonter le long de l’éboulis. Et quand elle parvint enfin à saisir une sangle en tissu de son sac, sac qu’elle avait elle-même fabriqué, elle débaroula une nouvelle fois le long de la pente, glissant plus qu’autre chose.

Une fois arrivée en bas, elle n’eut pas le courage de se relever, et, dans un ultime effort de concentration, l’apparente jeune femme projeta son esprit hors de son corps à la recherche du moindre individu à la ronde pour le guider jusqu’à elle. Est-ce que cela marcha ? A vrai dire elle ne s’en souvint pas puisque peu de temps après, elle s’évanouit.

Doucement, elle reprit conscience, d’abords yeux clos. Où était-elle ? Elle ne savait pas vraiment. Sa tête lui faisait l’effet qu’une multitude de cloches qui sonnaient le tocsin. Oh vindieu ! C’était sacrément douloureux ! Et impossible de réfléchir ! Bon o elle était aux dernières nouvelles ? Ah oui, la pineraie complètement brûlée…

Elle avait froid et pourtant elle était couverte par sa mince couverture de voyage, sa seule couverture d’ailleurs, elle résistait aux plus rudes hivers avec celle-ci, mais elle avait froid, elle était glacée, elle grelottait. Mais au moins il y avait un point positif, elle était en vie ! Oui ? c’est cela. Elle tenta de se relever, mais e »lle n’y parvint pas. Tout son corps était douloureux et sa jambe était bloquée….

Qui avait fait cela ? La jeune elfe commençait à paniquer et à baliser… que se passait-t-il ? ui l’avait aidé , Et pourquoi l’avoir aidée ?Que voulait cette personne ? Elle ferma les yeux…c’était un rêve, juste un rêve, en fait elle était restée chez elle, et elle allait reprendre conscience dans son plumard bien installée bien au chaud, et surtout seule.

Rouvrant les yeux, elle aperçut sa sauveuse et les referma aussitôt. Non, elle était seule, complètement seule ! Elle rouvrit les yeux…non, elle était là ! Une jeune femme fort plaisante à regarder, certes mais malgré cela, elle tenta à nouveau de se redresser, parvenant à s’asseoir. Elle se tourna vers la jeune femme et se contenta de dire :

« J’ai…j’ai glissé…. »

Elle désigna la pente ravinée du chef. Puis elle caressa doucement son bras. Il n’avait rien si ce n’est de beaux bleus assez étendus, mais elle se rappelait ainsi, par la douleur qu’elle était vivante. Mais bon, quand bien même, elle en profitait pour trouver une issue de secours, mais avec sa jambe c’était peine perdue

La belle elfe aux yeux vairons fut légèrement secouée quand elle comprit la réalité des évènements. Elle ne pouvait aller nulle part, là était le problème. Elle était bloquée ici ! Que quelqu’un lui offre la solitude s’il vous plait ! Finalement, elle eut le premier reflexe sensé depuis son réveil.

« Merci… »

Elle se tut et et se rallongea, observant le ciel, continuait de frissonner.

« J’ai froid….qui êtes-vous ? – elle se tut quelques instants avant de dire, plus bas, plus doucement, comme si elle craignait la réponse. – Pourquoi m’avoir aidé ? Que voulez vous ? »

« On m'appelle Myrrh et je suis Druide. Je passais près d'ici lorsque j'ai aperçu comme un fantôme vous ressemblant. Alors je l'ai suivi et je vous ai trouvé là.
En tout cas, vous ne craignez rien pour le moment. Je vais allumer un feu pour essayer de vous réchauffer. »

Elle hocha la tête, craintivement, tentant de prendre sur elle pour supporter la présence de quelqu’un d’autre. C’était très difficile de se retenir d’éclater en sanglots, d’autant que la douleur ne jouait pas en ce sens. On avait beau dire, mais elle souffrait pas mal de tous les coups qu’elle avait encaissés pendant la descente en « douceur ».

Discrètement elle tâta son visage, elle semblait, miraculeusement, ne pas avoir été défigurée…réaction étrange sans doute en un tel instant, mais bon, on ne se refait pas !

Elle chercha son sac du regard pendant que sa sauveuse se chargeait du feu…avec un singe ? bon, passons. Elle attrapa son sac et en sortit la seule chose qui la calmait et la détendait. Quelle ne fut pas sa surprise de voir que ses travaux sur étoffe avaient été complètement ruinés dans la chûte, elle en soupira de dépit, oubliant complètement l’autre personne soudainement.

« Ouf, j'ai cru que je n'allais jamais y arriver.... Rapprochez-vous, cela vous fera du bien de profiter de la chaleur des flammes. »

Elle hoqueta de surprise, elle l’avait si bien oubliée qu’elle avait été surprise de l’entendre ainsi parler. Elle fourra rapidement ses travaux désastreux, et pourtant fort joli selon le point de vu de tout néophyte, et opina du chef avant de ramper pour tenter de se rapprocher du feu. Elle en grimaça et en gémit de douleur avant de se retrouver assez proche du feu pour être à l’aise et profiter de sa chaleur grandissante.

Soudain elle eut une sorte de réminiscence, elle comprenait enfin ce qui s’était passé quand elle avait perdu connaissance. Pendant un bref instant, elle avait perdu l maitrise de sa science thaumaturgique, son esprit avait quitté son corps, et c’était là qu’elle avait rapidement aperçu sa sauveuse.

« C’était moi…..celle que vous avez vu….le fantôme…c’était moi… »

Elle se tut à nouveau, et pour cacher sa gêne, elle ressortit son canevas et y plaça un nouveau morceau d’étoffe. Elle sortit aussi sa trousse à broderie et sortir un fil et une aiguille, commençant à broder une mésange. Elle en oubliait tout le reste. Puis machinalement, elle dit alors qu’elle était en train de broder.

« Je m’appelle Nelindë, oui, c’est ça, Nelindë. »

Elle hocha la tête avant de finalement laisser tomber sa broderie, inachevée. Elle la lacéra avec son aiguille avant de la fourrer dans son sac. C’était laid, hideux, affreux. Elle n’arrivait à rien ! Et enfin, elle lâcha définitivement la bride à ses émotions et elle se mit à pleurer à chaudes larmes.

« J'ai...j'ai…j’ai mal…aidez moi…à…à… é...éliminer la…la…la..la souffrance. »

Articula-t-elle avec difficulté.

« Il faut essayer de vous calmer un peu d'abord. Respirez tranquillement vous aidera à maitriser la douleur. Pour le reste je dois avoir de quoi soulager votre douleur dans mon sac mais cela va me prendre quelques minutes. Vous pourrez patientez jusque-là? »

La jeune femme aux yeux vairons sourit en hochant la tête, reconnaissante. Les larmes de con corps continuaient à se déverser à ses pieds, coulant le long de ses joues doucement. Elle tentait de se calmer mais elle avait beaucoup de mal à le faire. Elle arrivait à retenir ses sanglots, mais rien de plus. Enfin bon, c’était déjà cela.

La vision brouillée par les larmes, elle observa tant bien que mal la jeune femme se démener pour elle, prendre des racines, les réduire en poudre et les faire bouillir, comme une tisane en somme. Puis elle lui tendit le bol brûlant qu’elle saisit et posa devant elle. Il était un peu trop chaud, et rien que l’odeur lui donnait envie de vomir, cela lui offrait de belles nausées. Non, elle ne pourrait pas boire ça. Il y avait l’odeur entêtante et assez violente qu’on lui imposait, et à cela, et elle ne voulait pas ajouter le goût. Non, elle ne pouvait pas….c’était plus fort qu’elle…

« Ceci devrait faire passer la douleur. Buvez-le lentement pour ne pas vous bruler et ne vous fiez pas à l'odeur. Vous verrez, vous vous sentirez mieux après. »

Ainsi elle devait vraiment le boire ? Bon, elle avait tellement mal qu’au fond, elle n’aurait même pas dû se poser la question de prendre cet antidouleur. Elle prit le bol doucement et le porta à ses lèvres, Elle le huma une dernière fois avant de le commencer à boire le liquide infect. Elle le but jusqu’à la dernière goutte. C’était encore pire que l’oeur, c’était infect au possible ! Tellement qu’elle eut.

Elle eut un hoquet, un hoquet, pûis un haut le cœur, avant de finir par tout recracher dans une gerbe de vomi. Au moins c’était clair, son estomac et le reste de son corps disait non ! Et son corps lui rappelait qui était le plus fort entre elle et lui. Elle leva un regard ennuyé sur Myrrh…..elle avait vomi droit devant elle, dans le feu, manquant de l’éteindre par la même occasion. Elle eut un nouveau haut le cœur, puis elle dit.

« dé…désolée… »

Elle se mordit la lèvre inférieure en se remettant à pleurer, les crampes d’estomac que lui avaient causé le soi-disant médicament, n’avaient fait que lui rappeler la souffrance de tout son corps. Instinctivement, elle tenta de replier la jambe sous elle, peine perdue et cela lui arracha un cri de douleur.

« Je…je suis sincèrement désolée…madame…je ne peux pas… »

Les larmes reprirent, et au-dessus de leur tête, dans un fracas, un orage éclata, faisant soudain tomber sur les deux elfes une pluie dense. Fort heureusement, l’orage qui avait éclaté se situait plus au sud…

Elle eut des yeux ronds comme des soucoupes en sentant l’elfe se placer à côté d’elle et l’enlacer tendrement. Oui, voilà, de la tendresse, c’était cela, enfin il lui semblait, cela faisait si longtemps qu’elle n’y avait pas goûté. Cela faisait si longtemps que personne n’avait été d’une si grande gentillesse, et gratuite qui plus est. Enfin, c’était son impression. Et même si la jeune femme tremblait, il fallait reconnaitre qu’elle se sentait déjà mieux ainsi, la laissant faire, la laissant caresser ses longs cheveux châtains. Elle en ferma les yeux de délice, et même si la pluie commença à tomber, elle ne le sentit pas comme un fardeau. Même la pluie était douce aujourd’hui, malgré le fait que c’étaient des trombes d’eau qui tombaient sur les deux elfes.

« Surtout, ne bougez pas. Vous ne craignez rien, d’accord ? Je vais tenter de nous aménager un abri. »

Elle hocha la tête, bon en même temps ne pouvant que ramper en l’état actuel des choses, elle n’irait pas loin si elle décidait de prendre la clé des champs…elle n’irait même nulle part…elle accepta bien volontiers la cape de la jeune femme, et la resserra même autour de ses épaules, comme pour se réchauffer alors qu’en définitive, il ne faisait pas vraiment froid, pas froid du tout même, mais on, un peu plus de chaleur est rassurant…

Si plus haut il a été dit qu’elle avait ouvert des yeux comme des soucoupes, ce n’est rien comparé à ce qui se passa après. En effet, la jeune femme fut surprise, et presque choquée de voir les arbres bouger mais c’était agréable de sentir au sec ! Elle en soupira de contentement et d’aise. C’était si agréable…elle en ferma les yeux avant de voir la jeune femme s’installer à ses côtés, elle semblait épuisé…comme si elle avait poussé les arrêts à main nues…elle était en plus aussi trempée que sa comparse du moment.

« Au moins, nous sommes à l’abri maintenant. »

Elle avait le souffle court, elle le sentait. Aussi Nelindë, ne sachant quoi faire de mieux, se blottit contre la jeune femme, partageant la chaleur de la cape avec elle, doucement, ses bras passèrent autour du corps de Myrrh, et dans un remerciement silencieux, elle la serra contre elle avec douceur, lui montrant qu’elle aussi pouvait faire preuve de douceur.

« Merci…mais c’est à vous de vous calmer maintenant… »

Une grande partie de sa timidité plus que maladive semblait s’être envolée au geste de douceur que la druidesse lui avait prodigué. Mais quoi de plus normal ? Cela faisait des années innombrables qu’elle n’y avait eues droit. Aussi, pas étonnant que cela semble briser la glace…

« Mais comment c’est apparu ? C’est vous qui avez fait ça ? »

Elle posa sa main sur le tronc de l’arbre calciné et s’émerveilla. On avait l’impression qu’il avait toujours été courbé ainsi, et pourtant, elle l’avait vu bouger. C’était incroyable…c’était magique ! Un peu comme quand elle se projetait ailleurs, mais en bien plus impressionant !

« Vous… Tu as raison. Je ne pensais pas que cela serait si compliqué. »

Elle hocah la tête mais elle se fit vite voler la vedette par le petit animal qui accompagnait Myrrh. C’était vraiment incroyable comme cette petite créature pouvait sembler être attachée à l’elfe, et de même, il semblait raisonnable de penser que c’était réciproque. Ce devait être son compagnon de route plus que son animal de compagnie. C’était trop mignon de la voir s’occuper du petit singe comme ça !

« Oui, c’est moi. Les druides sont des gens très proche de la nature, au point de parvenir à contrôler les plantes. Même si ces arbres semblaient morts de l’extérieur, j’ai voulu voir si mon pouvoir pouvait marcher sur eux aussi. Et voilà le résultat.
Par contre, c’est un exercice très fatigant. »

Elle hocha la tête, oui, normal que c’était fatigant, elle-même, quand elle utilisait ses dons, ça la fatiguait, alors normal que Myrrh, quand elle faisait de la magie, soit encore plus fatiguée ! Et puisqu’ils avaient tous les trois un abri, les deux elfes et le singe pouvaient prendre un peu de repos bien mérité, et un peu de réconfort dans la compagnie des autres.

Le chant des gouttes s’écrasant sur le rempart végétal était plutôt agréable. La jeune druide le trouvait doux et reposant. Malgré l’humidité ambiante, il faisait plutôt bon sous leur abri, la chaleur humaine permettant de compenser la température extérieure. Son petit primate à moitié assoupi dans ses bras, Myrrh se concentra un peu plus sur Nelindë. Elle semblait aller un peu mieux et cela la rassurait. Mais elle trouvait encore étrange de l’avoir trouvé ici. Que pouvait bien faire une jeune fille comme elle seule dans les environs ?

Lentement, le singe s’assoupissait dans les bras de Myrrh, attendrie, Nelindë, glissa avec délicatesse sa main vers le petit singe dans l’optique de lui offrir une ou deux caresses aussi douces que le miel.

« Que fais-tu par ici ? Il n’y a rien ni personne dans les environs. »

Elle fit mine d’ignorer la question. Non, elle ne voulait pas l’entendre, c’est tout, non, non, non, elle n’entendait pas cela ! Si elle voulait la mettre mal à l’aise, c’était réussi ! Elle ne savait plus où se mettre. Elle fuyait la compagnie mais en même temps, là elle en avait trouvé de la bonne et elle n’allait pas lui dire que c’était justement parce qu’il n’y avait personne qu’elle était venu ici, et donc lui dire qu’elle recherchait toujours la solitude.

Non, pas toujours, elle le réalisait maintenant. En cet instant, elle avait de la compagnie qu’elle appréciait. C’était la première fois que cela arrivait et ce n’était pas pour lui déplaire loin de là. Mais elle était bloquée pour dire certaines choses, d’autant plus si elle savait que cela pouvait être mal pris.

Elle sourit doucement avant de se blottir comme Myrrh, posant sa main sur le corps du petit singe, puis elle ferma les yeux de contentement avant de murmurer à mi voix, comme si elle avait peur de perdre tout en cet instant.

« J’ai fui mon chez moi car j’ai vu des gens s’en approcher…j’ai peur des gens… »

Non, c’est vrai ? Personne ne l’aurait deviné. C’était la vérité après tout et Myrrh avait déjà pu l’expérimenter. Mais Nel, partit comme elle était dans ses déclarations et ses révélations continua, tellement elle se sentait en sécurité. Elle ne s’était pas sentit si sereine depuis de nombreuses décennies.

« Les gens semblent ne pas m’aimer dès qu’ils voient ce que je suis capable de faire. Ils ont peur de mes dons, ou pour autre chose. Mais l’ennui, c’est que dès qu’ils l’apprennent ou le voit, ils viennent pour incendier mon chez moi et me faire du mal. Pourtant je ne fais rien de dangereux, je vois le passé, je peux aller voir ce qui se passe ailleurs sans bouger, et mes émotions influent sur la météo… »

En effet, la pluie diminuait d’intensité de manière très régulière, puis soudainement, elle redoubla d’intensité alors que la jeune femme recommençait à pleurer à chaudes larmes. Et avec peine, elle parvint à dire de manière saccadée, entre les sanglots, alors qu’elle enfouissait sa tête dans les cheveux de Myrrh, posant sa tête sur son épaule.

« Je…je n’ai…ja…ja….jamais fait de mal à personne pourtant…. »

Avoir quelqu’un à qui parler était si agréable, surtout quelqu’un qui écoutait. Peut-être que Nelindë ne se rendait pas compte de la thérapie que lui procurait Myrrh rien qu’en l’écoutant. Déverser son sac de malheurs, dire tout ce qu’elle avait besoin de dire, il lui avait fallu quelqu’un d’assez doux pour être capable de la rassurer, de ne pas lui faire peur, quelqu’un de gentil, comme Myrrh quoi. Et pour la première fois en plus d’un siècle, la belle elfe aux yeux vairons se sentait soulagée. Enfin, elel avait eu quelqu’un à qui s’adresser sans avoir peur de s’en prendre une à n’importe quel moment

Nelindë était fragile oui, moralement et mentalement, elle était fragile, surtout quand elle était en compagnie d’autres êtres soit disant évolués. Et grâce à Myrrh pour une fois, elle pouvait se laisser aller. La berceuse que lui fredonnait la jeune druide était douce, autant que ça voit, une couverture de miel sur un lit de douceur. Nel’ resserra son étreinte doucement, elle ne voulait pas que Myrrh la laisse seule, elle ne voulait pas qu’elle parte !

« Les gens ont peur de ce qu'ils ne connaissent pas. Plutôt que de l'admettre, ils tentent de le détruire. Ce n'est pas faute, cela à toujours été comme ça. C'est le propre de la bêtise humaine.
Et puis, tes dons doivent en gêner certains. Voir dans le passé doit être très intéressant mais on y cache beaucoup de choses que souvent on ne veut pas voir révéler. Pareil pour tes apparitions, cela les dérange et ils te font payer le prix fort parce que nombreux, ils ont compris qu'ils auront le dessus.
Tu vaux mieux que tous ces gens-là mais la souffrance et solitude sont souvent le tribut à payer pour une trop grande différence. »

Elle hocha la tête, oui, elle comprenait ce qu’elle disait, oui, c’était cela, elle le voyait tout à fait clairement, même si elle avait du mal à l’appréhender, elle-même étant trop curieuse pour ne pas aller au-devant de l’inconnu. Logique. Mais c’était vrai qu’elle avait payé le prix fort pour cette originalité qui la faisait paraitre comme une cible de choix pour toutes formes de violence. Et elle n’en pouvait plus de fuir. Mais c’était cela qui l’avait maintenue en vie, en bonne santé physique, et en liberté, aussi, elle comprenait cette nécessité, c’était aussi nécessaire que la vie en solitaire, c’était dur à supporter, mais ça se comprenait, c’était un choix de vie. Quoiqu’elle n’avait pas vraiment eu le choix.

Nelindë laissa Myrrh =guider sa main pour aller cajoler le petit singe aux endroits qu’il préférait. Le voir sourire dans son sommeil était si mignon, cela lui brisait le cœur de savoir que même un animal de compagnie, elle n’avait pas pu en avoir…elle avait du vivre complètement seule, et elle comprenait l’étendue de ce qu’elle avait ignoré. C’était un gouffre, un abîme.

« Merci… »

Elle sourit, ses larmes se tarissant peu à peu, le sourire, discret et timide, et le beau temps, firent très doucement leur retour. Elle continuait de câliner le petit singe. Elle resta ainsi blottit contre Myrrh.

« Merci de m’écouter et de rester avec moi malgré ce que je suis. »

Elle déposa un baiser tout doux tout gentil, tout mignon, sur la joue de l’elfe avant de se dégager de ses bras, prenant un peu de recul pour ressortir son canevas et un morceau d’étoffe. Elle voulait la remercier, et elle voulait lui faire un petit cadeau. Cessant de caresser le petit primate, elle prit un fil choisi dans un vrai foutoir, un fil correspondant à la couleur des cheveux de Myrrh, ou du moins, ce qu’elle avait de plus approchant, et commença à broder, non sans avoir, au préalable, croqué rapidement la jeune femme sur le tissu, histoire d’avoir des repères. Elle voulait lui faire un beau cadeau, elle ignorait juste que ce genre de broderies qu’elle jugeait basiques était très prisé en ville, elle allait sans le savoir lui offrir un vrai trésor.

Pour son œuvre elle avait pris sa dernière étoffe qu’elle avait avec elle, un morceau te tissu d’une trentaine de centimètres de long pour une vingtaine de large, de la couleur d’une feuille d’orme en automne.

« Evitez de trop bouger ! Pour ne pas fausser mon travail et les reflets. Sinon ça ne sera pas joli ! »

Ce serait aussi laid que celui qu’elle avait détruit un peu plus tôt…elle espérait juste que cela lui ferait plaisir, elle ne pouvait rien faire de plus. L’ouvrage lui prendrait sans doute une bonne heure, peut-être même deux. Elle était plus habile avec une aiguille qu’avec un couteau. Et là-dedans, toute la concentration y passait. Il fallait de la patience pour un bel ouvrage, et plus encore pour un portrait. Mais elle avait la main sur et une habitude vieille de deux cents ans…

(si tu ne vois pas comment meubler, tu peux faire une ellipse sur les deux heures et considérer qu’une fois le travail fait, Ma miss te tend l’etoffe. )

« Je vais faire mon possible. »

En même temps, si elle ne le faisait pas, disons que le rendu ne mériterait pas d’être vu par qui que ce soit et qu’elle préfèrerait le détruire et le lacérer plutôt que d’exposer la médiocrité à l’air libre, enfin, la médiocrité…cette médiocrité-là du moins, et ce, parce que c’était un cadeau , tout bêtement, et elle voulait qu’il soit parfait pour une personne d’exception. Oui, Myrrh était une personne d’exception, dans le sens où elle l’avait comprise, elle l’avait écoutée, elle l’avait rassurée. Et c’était la première à le faire en deux siècles, depuis la séparation d’avec ses parents.

Deux heures, deux bonnes grosses heures, voilà le temps que lui prit son ouvrage, ou du moins que lui prit un ouvrage aussi fondamental, aussi basique, car elle n’avait fait qu’un simple buste, le buste de Myrrh. Puis, enfin, quand elle sembla satisfaite et qu’elle eut fait les retouches à son œuvre, elle se décida à la montrer au grand jour, tendant le canevas à l’elfe, Nelindë souriait en faisant cela, car c’était un ouvrage tout à fait acceptable, et même très bien !

Mais pourquoi l’elfe brune fut-elle aussi surprise par la qualité de son œuvre, c’était dans sa moyenne, c’était beau, mais sans rien de transcendant ! La seule chose qui avait jamais dépassé ses capactiés était son propre reflet, elle n’arrivait jamais à un nivau suffisant pour se broder elle-même, n’arrivant pas, elle trouvait, à retranscrire sa propre beauté. Enfin bref, elle sortitde ses pensées quand Myrrh reprit la parole.

« C’est magnifique. Tu as un véritable don pour ce genre de choses. Tu sais, certaines personnes seraient prêtes à payer des sommes considérables pour posséder de tels chefs d’œuvres. »

La belle elfe auburn rosit très légèrement sous le compliment, mine de rien son égo était flatté ! Mais même au ela de ça, le fait que ce compliment vienne d’elle lui allait vraiment droit au cœur. Elle en était vraiment touchée. Aussi ne dit elle rien, se contentant de baisser la tpete cachant sa rougeur dans ses cheveux.

Mais pourquoi cette référence à un quelconque prix ? Cela valait vraiment tant que ça ? C’était pourtant un ouvrage juste bien, rien de transcendant non plus, il était juste assez joli pour ne pas être détruit. Et puis l’argent n’avait aucune valeur à ses yeux ! Absolument aucune ! Ou du moins, pour elle, donc sur le cou que ça ne vaille pas cher ou que ce soit hors de prix…kif kif…

« Dis-moi, Nelindë, que comptes-tu faire maintenant ? Je veux dire, quand tu pourras remarcher, où iras-tu ? Tu vas rester seule, à nouveau ? »

La question prenait Nelindë de cours. Que comptait-elle faire ? Bonne question…poursuivre sa route sans doute…ou alors elle pourrait ^peut être rester ici, dans le coin…oui, ça pourrait le faire…tout était brulé mais avec un peu de chance, non beaucoup de chances, le terrain redeviendrait bientôt fertile si il était soumis à de bonnes intempéres comme celles qui avaient le don de la suivre….

« Merci, je vous le donne si vous voulez, c’est un cadeau pour vois ! Pour vous remercier. »

Elle lâcha le canevas entre les mains de Myrrh. Elle refuserait de le reprendre, quand bien même elle lui forcerait la main elle trouverait un moyen de le lui laisser. Hors de question que cela reste avec Nel’, elle avait fait un cadeau à Myrrh et entendait qu’elle le garde, ce serait un souvenir. Ou non, mieux, elle avait une meilleure idée, oui, une bien meilleure idée.

« Attendez… »

Elle farfouilla dans son sac avant de lui donner une réalisation antérieure qu’elle trouvait moyenne mais qu’elle avait gardé, un autoportrait en broderie. Elle le lui tendit aussi.

« Il n’est pas terrible (selon ses critères), mais au moins comme ça vous vous souviendrez de moi ! Et je vais faire une esquisse de ce que je vous ai fait, comme ça, j’aurai un souvenir de vous ! »

Doucement, elle prit une paire de ciseaux et l’approcha de la tête de Myrrh lui disant qu’elle ne lui ferait rien de mal. Elle prit une mèche entre ses doigts et doucement elle la coupa.

« En plus d’avoir un souvenir de vous, grace à ça je pourrai même vous retrouver en pensée et en me projettant ailleurs ; Vous me verrez peut être ainsi. »

Oui, elle n’avait aucune envie d’une quelconque séparation mais elle n’était pas dupe. Elle savait qu’elle viendrait pour la simple et bonne raison qu’elles semblaient être toutes deux des voyageuses, et donc que les probabilités de se revoir étaient astronomiquement faibles. Elle lui sourit et déposa une aiutre bise sur sa joue avant de nouer la mèche pour la retrouver plus facilement et elle la cousu sur un petit échantillon e tissu, pour ne pas la perdre, avant de la ranger dans son sac.

« Ce que je vais faire…je sais pas, je vais peut-être aller vers Naturalia pour m’y trouver un coin tranquille, quoiqu’ici, j’ai sans doute une assurance de tranquillité, l’ennui sera sans doute les provisions de bouche…Je ne manque que des fruits et autres légumes, ni poisson, ni viande…ou sinon, je repartirais sur les routes…je verrai… »

Elle sourit avant d’ajouter :

« Mais pourquoi avez-vous parlé de prix, ça vaut si cher que ça à votre avis ? Parce que je trouve ça joli, oui, mais ce n’est rien comparé à certaines merveilles que j’ai vue, comment peut -on estimer la valeur de ces broderies sur leur beauté quand on voit la nature et ses bienfaits ? Et pouruoi parler argent ? ça n’a aucune valeur, que ce soit cher ou pas, l’important, c’est que cela vienne du cœur, non ? »