Une promenade pas si tranquille... (PV Myrrh)

Écartant une branche qui se trouvait à hauteur de son visage, Sven promena son regard sur l’étendue verdoyante qui s’étendait devant lui. Cet énorme bosquet dégagé possédait peut-être ce qu’il cherchait… Il passa le mur de d’arbre devant lui et s’aventura dans le cercle de pelouse recouverte de champignons de toutes sortes. Lentement, et avec précaution, l’apprenti Mage Noir les étudia les uns après les autres. Puis, au bout d’une dizaine de minute, il poussa un soupir de frustration. Ils étaient tous comestibles! Il n’y avait pas la moindre trace de champignons mortels ou simplement nocif pour la santé. Cela faisait des heures qu’il cherchait des plantes vénéneuses et des baies empoisonnées! À croire que cette forêt luxuriante ne contenait que des espèces bénéfiques à l’alimentation! En ce cas, il aurait grandement perdu son temps dans cet endroit dégoutant, ruisselant de vie et de bruit sauvage, animant presque joyeusement la place.

Décomposé par son échec, le démon passa son chemin afin de retrouver le sentier principal, celui que prenait tout voyageur prudent qui avait trop peur de s’éloigner. En effet, Sven avait un très bon sens de l’orientation, même en nature. Il lui était presque impossible de perdre son chemin. Longeant le sentier, il récupéra tout de même des ingrédients classiques qu’il utilisait souvent pour des potions et des remèdes simples. Il prit d’ailleurs le loisirs de s’emparer de façon gourmandes de quelques baies, champignons comestibles et plantes à épices. Oui, étonnement, et bien qu’il soit un serviteur de l’ombre, Sven aimait particulièrement la cuisine. Après tout, gaspiller sa fortune dans des auberges le rendrait rapidement pauvre, s’il devait toujours manger là bas! De plus, sa cuisine personnelle était très bien…

Le crépuscule, déjà bien en place, envoyait à travers les branches des filets de lumière écarlates, donnant à la forêt, d’habitude si accueillante, un aspect presque terrifiant. Les passants se faisaient moins nombreux, d’ailleurs, s’empressant de quitter les lieux avant d’être rattrapés par l’obscurité croissante. Sven ne s’en formalisa pas, contrairement à eux. Il aimait la nuit, il l’adoptait, ne la craignait pas. Elle était son domaine. Il était son amant. La noirceur le mettait à l’aise. Il s’y mouvait ave grâce, confiance et détermination. Elle le cachait et le protégeait de ceux qui ne pouvaient pas y voir. Et parfois, il voyait mieux les choses ainsi.

Parlant de cela, le démon aux cheveux noirs vit quelque chose, en retrait du sentier principal, qui retint son attention. Une plante. Beaucoup moins vertes que ses congénères. Intrigué, il quitta le chemin et s’engagea dans la nature indomptée. Il écarta et brisa les branches sans retenue, détruisant l’habitat sans regret. Cela repousserait, de toutes façons! Il glaça à l’aide de ses pouvoirs un ruisseau trop large pour un saut, frigorifiant les poissons qui s’y trouvaient. Ainsi il passa avec agilité sur son pont de glace improvisé. Arrivé jusqu’à la plante, d’une couleur jaunâtre, il l’étudia quelques minutes. Il n’en avait jamais vu auparavant. Il fouilla donc dans son grimoire d’informations générales, mais ne trouva nulle trace de ce spécimen. Il devrait alors faire des expériences pour déterminer ses propriétés. Il tendit alors sa main blafarde en direction de la plante et referma sa main dessus dans l’intention de l’arracher de terre.

Pic!

- Ouch! vociféra Sven en retirant vivement sa main, comme s’il s’était brûlé

Il examina sa main et constata que le spécimen qu’il venait de trouver avec de fines épines, maintenant enfoncées dans sa paume. Serrant les dents, le démon sortit sa paire de gants en cuir noir et s’en servit pour saisir la plante, qu’il rangea par la suite dans son sac. La blessure, d’apparence pourtant superficielle, lui faisait un mal de chien! Quelques minuscules gouttes de sang perlaient sur sa peau, contribuant à la douleur. Ça brulait, ça le démangeait. Mais sur quel genre de plante était-il donc tombé? Peu importe, il allait l’étudier plus tard. Pour le moment, il devait continuer sa route.

Au lieu de prendre le sentier, il continua tout simplement à travers les bois sauvages, glaçant sans merci la nature à son passage, signe de la fureur qu’il ressentait en ce moment même à cause de sa blessure. D’ailleurs, sa main piquée était engourdie, maintenant, et il joua des doigts pour améliorer la circulation de son sang. Sale journée….

Une dizaine de minutes plus tard, il s’arrêta au milieu de nulle part, essoufflé de manière inexplicable. Soupirant, il s’installa donc au pied d’un grand chêne, dos contre l’écorce, histoire de se reposer un peu. Machinalement, il mangea des baies comestibles, profitant de cette pause méritée. Un petit tamia passa près de lui, réclamant des fruits à son tour. Sven tendit la main pour le laisser s’approcher de la baie qui lui restait. Puis, au dernier moment, il libéra son pouvoir. L’animal n’eut pas le temps de faire demi-tour qu’il était déjà transformé en petit bibelot de glace. Sven le prit avec délicatesse et le regarda. Le tamia n’était peut-être pas mort, en dessous de la pellicule de glace… À vrai dire, il n’en savait, rien, n’ayant jamais déglacé quoi que ce soit….

Ayant un léger malaise, il se débarrassa du petit rongeur surgelé, le lançant dans un buisson, et prit une profonde respiration afin de calmer les battements affolés de son cœur. Peut-être un coup de chaleur… Il but donc une gorgée d’eau de sa gourde et posa sa tête contre le tronc pour fermer les yeux un court instant.

Après tout, rien ne pourrait lui arriver ici.

Invité

C'est étrange. Cela ne faisait pourtant pas si longtemps que cela que la jeune elfe avait choisi de quitter le couvert et la protection bienfaitrice de la forêt pour se lancer à la découverte du monde. Cependant, plus elle se rapprochait de la forêt, plus une certaine angoisse venait la saisir. Cela n'avait aucun sens. Pourtant, depuis qu'elle avait vu ce qui était arrivé au Paradis séculaire, aujourd'hui transformé en pineraie calciné, elle ne pouvait s'empêcher de craindre pour le lieu qui l'avait vu grandir. Certes, il y avait des choses magnifiques en dehors de ce lieu paisible mais elle y avait aussi côtoyé des choses qu'elle aurait préférées ignoré. La violence et la bêtise de certains lui laissait encore un souvenir amer. Elle ne put retenir un soupir en songeant à tout cela.

Pourtant, lorsque enfin la forêt apparut sous ses yeux, une douce chaleur envahit tout son être. Rien n'avait changé vu de l'extérieur et cela la soulageait. D'ailleurs, elle ne fut pas la seule à manifester sa joie de revenir à ses origines. Le petit primate perché sur son épaule qui n'avait pas dit mot depuis un moment venait comme soudain de se réveiller, vociférant joyeusement tout en sautillant sur place. Douter de sa joie de revoir sa contrée natale était impossible. Un sourire franc apparut sur le visage de la jeune femme tandis qu'elle arrivait à l'orée de ce lieu si connu et pourtant encore si mystérieux. Car la nature renferme tant de secrets, il serait idiot de croire que nous les connaissons tous.

Arrivée au pied des premiers troncs, elle laissa ses doigts caresser doucement les écorces pleines de vie. Comme il était agréable de ce retrouvé en terrain connu. Son voyage lui avait été très bénéfique mais la forêt lui avait manqué plus qu'elle ne voulait bien l'admettre. Et même si elle savait qu'elle ne resterait pas longtemps dans les environs, quel soulagement de voir que certaines choses ne changeaient pas. Que certains repères demeuraient malgré les affres du temps. S'engageant enfin sous la voute verdoyante alors que les dernières personnes présentes prenaient le chemin inverse en raison de la tombée de la nuit, Myrrh se détourna rapidement des sentiers balisés. Comme si elle en avait besoin.

C'est alors qu'elle avançait d'un pas fluide et calme qu'un reflet étrange attira son attention. Un éclat vif qui n'avait absolument pas sa place en ces lieux. Sa curiosité la poussa à se rapprocher avant de découvrir devant elle comme une travée ouverte à travers bois à coup de glace. Un instant sidérée de surprise, elle ne put que regarder les plantes ainsi prisonnière dépérir lentement à l'intérieur de leur prison givrée. Mais qui pouvait bien avoir fait ça? Ty'ee se mit à montrer les crocs de façon assez évocatrice mais la jeune elfe prit sur elle pour le calmer. Avant tout, il fallait trouver l'origine de ce désastre.

Suivant le chemin de glace ainsi laissé, la jeune druide ne mit pas longtemps à remonter à la source du problème. De loin, elle repéra une forme humaine adossée à un tronc épais. D'abord, elle choisit de se contenter de l'observer, curieuse de savoir s'il était bien le responsable de tout ceci. Mais lorsque son pied heurta l'animal emprisonné dans son carcan de glace, elle refuse de rester plus longtemps cachée. Il fallait faire quelque chose avant que cet étranger n'en vienne à tout détruire de façon irrémédiable. Prenant le tamia gelé dans sa paume, elle sortit de l'ombre des buissons et s'approcha de l'inconnu. Elle d'habitude si calme sentait la moutarde lui monter au nez. Aussi s'arrêta t'elle à distance raisonnable avant de lui lancer avec violence l'animal gelé qui atterrit sur les genoux de l'étranger, le regard braqué sur lui plein de reproches non dissimulés.

- Vous n'avez rien de mieux à faire?

Sven s’était presque assoupi, déjà. Son esprit était loin das les brumes alors qu’il était semi endormi et semi conscient, comme doutant de ce qui était réel ou non. Est-ce que la brise qu’il sentait sur lui était issue des songes? Est-ce que tout ses bruits d’oiseaux étaient vrais? La sensation dur et froide sur ses genoux était-elle présente? La chose qui le tira de ses vagues réflexion fut une voix féminine, prononçant des mots réprobateurs sur un ton mécontent. Alors, lentement, Sven ouvrit un oeil, puis un autre, et fixa droit devant lui la silhouette qui le défait du regard. C’était une jeune femme, sans doute la vingtaine d’années... de plus, à voir sa stature, la forme de son visage et ses traits, il s’agissait sans doute d’une elfe. D’ailleurs, lui ausi ressemblait quelque peu à cette race, dut au fait que ses oreilles étaient quelque peu pointues. Mais il était trop grand pour un elfe, et son regard en disait long sur ce qu’il était. N’empêche, il avait déjà vu des elfes femelles alors qu’il voyageait, mais celle-là, oui, celle-là précisement, était tout spécialement agréable. Elle ne pouvait presque pas être réelle. Et puis, dans l’état où il se trouvait en ce moment, il n’était pas certain qu’elle soit vraiment là. Elle était peut-être un rêve.

*Un très beau rêve, songea-t-il en ayant une pensée grivoise à son égard.*

En effet, s’il avait été en forme, il lui aurait probablement fait des avances physiques, mais il se sentait trop mou pour le moment, comme s’il avait les muscles en chiffon. Il se contenta alors de prendre appui sur l’arbre et de se remettre sur pied, forçant ses jambes à ne pas trembler sous l’effort inexplicable. Pour avait-il l’impression d’être resté allité durant des semaines? C’était ridicule. Presque effrayant. Il ne prit d’ailleurs même pas la peine de poser sa main sur son épée, car il ne considérait absolument pas que cette donzelle puisse lui causer du danger. Elle semblait bien trop fragile pour s’attaquer à un démon comme lui. À moins qu’elle ne lui réserve quelques surprises. Ses vêtements étaient curieux, lié intimement à cet habitat. Elle vivait sans doute dans la forêt. Peut-être appartenait-elle à l’ordre des Shamans ou des Druides, il ne pouvait avoir les idées très claires.

Lâchant le tronc de l’arbre pour être debout sans appui, il redressa la tête et la toisa de haut, son air habituellement hautain remplacé par une curiosité non feinte. Il glissa sa main gauche sur sa hanche d’un air semi décontracté et esquissa un sourire charmeur.

- Je te trouve bien intrépide pour me parler sur ce ton, demoiselle... je te suggère de faire autrement.

En effet, l’Apprenti Mage Noir détestait les gens qui s’adressait à lui de façon si brusque. Même si elle était une femme, elle devait se montrer courtoise avec les inconnus, non? C’était la base même du respect. Mais bon, qui pouvait donc vouer un quelconque respect à un être démoniaque? Elle n’aimait sans doute pas le fait qu’il est ravagé les végétaux sur son chemin. Mais ce n’était que de vulgaires plantes. Inutile de s’affoler, donc...

- Ce ne sont que des êtres sans âme, marmonna-t-il en mettant ses pensées en paroles. Ils repousseront, c’est tout... (Il se pencha en vacillant pour ramasser le tamia gelé.) Mais si ça peut te faire plaisir...

Il posa sa paume au dessus de la statuette de glace et crispa ses doigts. Lentement, le givre se craquela, doucement, jusqu’à tombé par éclat, libérant le tamia qui, heureusement et étonnement, était toujorus en vie, quoi qu’un peu étourdi. Quand il eut repris ses esprit, il regarda Sven, agita les oreilles, et couina avant de sauter de sa paume pour courir jusqu’à un buisson, à côté de l’elfe.

- Ça va, tu es contente? Maintenant va-t-en, je ne me sens pas bien du tout...

Il appuya ses propos en se laissant retombé sur le sol, assis et le souffle court. Après une réflexion courte, il en déduit que la plante qu’il avait ceuillit quelques temps plus tôt devait être empoisonnée. Il commença donc à fouiller dans son sac, à la recherche d’un quelconque antidote ou bien d’un baume qui le soulagerait temporairement. Il ne portait presque plus attention à l’elfe, lui lançant de temps à autre un regard peu hospitalier.

Invité

La jeune elfe ne se mettait que rarement en colère. Après tout, cela ne servait à rien si ce n'est à brouiller ses propres pensées et pousser les gens à faire ou dire des choses qu'ils regretteraient aussitôt revenus à leur état normal. Mais il y a toujours des exceptions. Toucher à la nature devant un elfe n'est jamais une bonne idée. Devant un druide, encore moins. Alors devant une elfe druide, qui plus est aux alentours de leur lieu de retraite, de leur sanctuaire, là, c'était plus qu'il n'en fallait. Cependant, cela ne suffirait pas à lui faire commettre l'erreur de sous-estimer la personne en face d'elle. S'il y avait bien une chose qu'elle avait de son voyage, c'était de se méfier. De tout et de tout le monde.

Elle resta donc à distance respectable, observant l'homme se relever apparemment avec une certaine difficulté. Pourtant, vu sa carrure, ce genre de petit geste ne devrait lui causer aucun souci. Cependant, une fois debout, ce dernier n'hésita pas une seconde à la toiser de toute sa hauteur. Il était bien plus grand qu'elle, mais cela ne suffirai pas à la faire changer son regard, réprobateur. Dans un air des plus décontracté, il se permit même de lui une remarque quand à son comportement. Franchement, il n'était pas culotté celui-là. Elle hésita un moment à lui répondre. De toute façon, il ne méritait pas qu'elle prenne cette peine. Pourtant, elle ne résista pas à l'envie de lui asséner une remarque de son cru.

- Et comment devrais-je faire? Je n'y peux rien si la vérité vous blesse.

Elle avait peut-être laissé la courtoisie et la politesse de côté mais lui n'avait pas fait d'efforts non plus. Et puis, c'est lui qui était en tort, pas elle. De plus, ses paroles suivantes manquèrent de lui arracher un juron. Comment ça, des êtres sans âmes? Mais qui pouvait-il être pour avoir si peu de respect pour des êtres vivants? Les plantes étaient essentielles à l'équilibre du monde et il les considérait comme de simples détails? Elle se força à souffler un grand coup pour ne pas rétorquer.

Cependant, il fit l'effort de récupérer le tamia gelé qu'elle lui avait renvoyé avant de le libérer de sa prison de glace. Le soulagement pu se lire sur le visage de la jeune femme lorsque ce dernier se mit à couiner avant de se sauver sans demander son reste. Au moins, elle avait réussi à sauver quelque chose dans tout le désastre que cet homme avait provoqué. Avec un air renfrogné et une remarque presque accusatrice, il lui intima l'ordre de partir. Cependant, bien qu'elle soit encore en colère, elle n'était pas dupe de son état. En effet, il n'était pas bien, cela crevait les yeux. Alors, au lieu de partir, elle se contenta de l'observer fouiller dans son sac.

Tandis qu'il remuait le contenue de son sac, la jeune elfe finit par entrapercevoir des pétales jaunâtres. Son regard se fronça. Si cette plante était bien celle qu'elle pensait, l'homme en face d'elle risquait d'avoir de sérieux ennuis. Et très rapidement.

- Essoufflement, grande fatigue, faiblesse physique.... Le prochain symptôme sera une certaine déficience visuelle. J'espère pour vous que vous possédez le remède adéquat.

Son ton n'était plus ni mécontent, ni même furieux. Plutôt interrogateur, voir un peu inquiet. Elle connaissait les effets des poisons de chaque plante des environs et si il avait bien cueilli la 'Robe de Thanathos' comme elle le pensait, il allait avoir besoin d'aide. Et la seule personne capable de lui en fournir rapidement était elle. Même si cette idée ne l’enthousiasmait pas vraiment.

Elle était drôle. Très drôle. Certes Sven n’était pas dans le meilleur des états pour faire ce genre de remarques, mais il n’y pouvait rien. Il était une grande gueule, et le fait de voir cette fille, dont il ne connaissant nullement les compétences, lui répliquer si ouvertement le faisait sourire. Le démon était un Apprenti arrogant. Arrogant et surtout très orgueilleux. C’était un défaut qui pouvait lui apporter des ennuis, surtout s’il jouait au malin avec plus gros et plus fort que lui. Mais cette mignonne ne pouvait pas être bien dangereuse, non? Ce n’était qu’une petite elfe des bois, sans doute du genre à batifoler dans les champs sous une pluie fine. Elle pouvait bien y aller, danser. Il n’avait pas besoin d’une petite fouine qui lui casse les oreilles, surtout pas dans son état.

Sven fit une courte pause, glissant son regard sur sa main blessée. Ça picotait. C’était engourdi et vraiment désagréable. Sans aucun doute, c’était cette espèce de plante jaune qui lui avait causé cela. Il était empoisonné, il en était certain. La question qui lui tournait dans la tête pour le moment était : est-ce que les symptômes pouvaient le mener à l’inconscience? Voir la mort? Le démon eut un court rire. Ce serait tellement stupide de mourir ainsi, empoisonné par une petite plante. Quelle humiliation! Mais ça n’arriverait pas. Oh que non! Pas avant d’avoir fait changer les choses dans ce monde de chaos absolu.

La voix de l’elfe le tira de sa réflexion et il leva les yeux vers elle. Que fichait-elle encore ici? Il n’avait donc pas été assez clair en lui disant de déguerpir? Malgré tout, il écouta ses propos patiemment. L’apprenti arqua un sourcil. Ainsi donc, elle semblait connaître par cœur les symptômes de cette herbacée. Très maligne. Sven referma plongea la main dans son sac pour en ressortir la plante qui l’avait blessé. Prudemment, il la manipula pour l’examiner sous plusieurs angles, et ensuite, il la lança vers la jeune femme, à quelques mètres de ses pieds. Il ne voulait pas qu’elle pense qu’il essayait de la piquer avec cette chose.

Il pointa d’un index trembla la plante avant de demander :

-Tu connais cette espèce? Depuis que je m’y suis piqué, j’ai tous ces malaises que tu m’as nommé, excepté la défaillance de la vue.

Il poussa un soupire essoufflé et se releva de nouveau, dégainant son épée afin de s’en servir comme appui de fortune. Il fit deux ou trois pas dans sa direction et s’arrêta. Il hésita un léger instant, ne sachant pas comment elle pourrait réagir à sa future question.

- Et est-ce que….tu sais quel genre de remède il me faut?

Il doutait fort de sa coopération. Après tout, il avait été quelque peu vilain à son égard, n’est-ce pas? Mais qui sait? Peut-être qu’elle était une gentille fille…. Sven ne pouvait que l’espérer. D’ailleurs, pour empirer les choses encore d’un cran, sa vue se brouilla durant un instant. Et après, ce serait quoi?

Invité

Franchement, qu’est-ce qui la retenait ici ? Après tout, si jamais il était bien empoisonné comme elle le craignait, elle le connaissait pas et ne lui devait rien. Sans compter qu’au regard de tout ce qu’il avait détruit sur son détruit sur son passage, elle se remettrait très bien de la perte d’un être tel que lui. Alors, pourquoi n’arrivait-elle pas tout simplement à tourner les talons et à l’abandonner à son sort ? Plusieurs choses dont la plus puissante était sans aucun doute cette curiosité maladive qui l’habitait. Ce trait de caractère n’avait pourtant rien d’elfique mais il était tellement ancré en elle qu’elle avait toujours ce besoin de tout comprendre, de tout connaître et de tout savoir.

Lorsque le Mage Noir se mit à rire de façon aussi soudaine que courte, elle fronça un instant les sourcils. Etait-il déjà pris de folie ? Après tout, cela n’aurait rien d’étonnant. Mais son regard paraissait encore trop clair pour cela. En tout cas, elle eut le plaisir de voir que ses paroles firent mouches. Lui qui ne souhaitaient qu’une chose, à savoir la voir décamper, le voilà qui semblait réviser son jugement. Apparemment, sa main avait un rapport avec ces symptômes car ce n’était pas la première fois qu’il la fixait ainsi. Sans doute par là que l’empoisonnement se répandait.

En tout cas, l’inconnu ne la chassa pas de nouveau. Et puis, comme si il avait le moindre pouvoir sur elle. Il ne devait pas oublié qu’il était ici chez elle et pas l’inverse. Mais bon, ces basses préoccupations l’occuperont une autre fois. A présent, le voilà qui se mit à fouiller dans son sac avant de finir par en sortir une superbe fleur aux larges pétales dorées. Malgré les précautions évidentes qu’il prenait pour la manipuler, la jeune Druide ne put s’empêcher de retenir son souffle. S’il n’était pas complètement inconscient, c’est qu’il était suicidaire ou parfaitement stupide. Les diverses opinions se disputaient la place de choix dans son esprit avant que le démon ne la lance à ses pieds.

- Avez-vous la moindre idée de la plante à laquelle vous vous êtes frotté ? La ‘Robe de Thanatos’ est sacré en ces lieux. Et surtout, c’est l’un des plus violents poisons existant en ces contrées.

Sa voix avait un accent presque révérencieux. Cette fleur était si rare que la voir ainsi traitée lui faisait mal au cœur. Mais maintenant, le souci pour elle n’était plus de savoir quoi faire de la plante mais qu’elle décision prendre à propos de l’homme en face d’elle. Visiblement, il était déjà sérieusement atteint. Et le voilà qui osait demander son aide après tout ce qu’il avait fait ? Eh bien, il ne manquait pas de culot.

- Oui, je connais le remède. Mais maintenant, c’est une course contre la montre qui s’est enclenchée et je crains fort que seul, vous n’ayez aucune chance….

Il y eut un instant de silence que rien, pas même le vent, ne vint briser. Puis, elle lâcha un soupir avant de siffler une note aigu qui fut aussitôt suivit par l’apparition de son cher compagnon à fourrure. Elle lui désigna la plante du regard et ce dernier se pressa d’aller la prendre avant qu’elle-même ne s’avance d’un pas décidé vers le démon mal en point. Elle saisit ses mains fermement, les examinant avec attention. Puis, elle planta son regard dans le sien, et déclara avec fermeté.

- Maintenant, vous vous asseyez et vous limitez au maximum vos mouvements pour éviter que le poison n’atteigne votre cœur. Et vous faites exactement ce que je vous dis et sans discuter si vous tenez un tant soit peu à la vie.

Elle le fit asseoir avant de faire signe au petit singe d’approcher avec la fleur. Ce dernier montra les crocs, le mage noir ne lui plaisant absolument pas mais s’exécuta malgré tout. La jeune elfe arracha trois pétales dont elle fit un pansement pour la main blessée, ces derniers ayant pour but d’absorber un maximum de poison des minuscules épines encore enfoncées dans sa chair.

- Après la déficience visuelle viendront des soucis de coordination avant que ne se déclenche une perte de l’expression et pour finir, des difficultés respiratoires menant à l’asphyxie, si un arrêt cardiaque n’est pas intervenu avant.
Pour l’instant, je ne fais que ralentir les effets du poison mais pour vous en débarrasser, il va falloir le stopper définitivement. Il y a deux solutions possibles à votre stade : L’amputation de votre bras pour empêcher le poison d’atteindre le cœur, où le ‘rejet’ du poison par votre corps qui est lent et plutôt douloureux.
Je vous laisse le choix, mais ne tarder pas à le faire. Je peux encore changer d’avis et vous abandonner là.

Si le Mage Noir était reticent à papoter avec cette jeune femme, ce n’était pas sa faute.... C’était sa nature de Mage maléfique – légèrement trop fière – qui le puossait à avoir ce ton et cet air hautain. Après tout, quoi de plus gênant que de se faire faire la leçon du jour par une si jeune fille – du moins en apparence! – et qui, de plus, n’appartenait de toutes évidences pas à son Ordre. Disons simplement que c’était quelque peu humiliant pour quelqu’un comme lui... Malgré tout, il se força à écouter ses dires, puisque ces informations pouvaient s’avérer extrêmement précieuses à la continuité de son existence en ce monde. Surtout, elle semblait s’y connaître bien plus que lui en matière de plantes empoisonnées. Peut-être devait-il passer par dessus son égo démesuré et la laisser faire... Pourquoi pas?

Son sang ne fit qu’un tour lorsqu’elle précisa qu’il n’y avait pas de temps à perdre. C’était donc si terrible que cela? Si rapide? Le démon n’arrivait pas à réaliser qu’il courait le risque de mourir d’un instant à l’autre s’il ne faisait rien pour empêcher la circulation du poison dans ses veines. Au début, il ne sut pas quoi dire... Puis, avec évidence, il se fâcha presque :
- Quoi!? Une course contre la montre? Mais c’est une plaisanterie!
Il n’en dit pas plus, scié en deux par une douleur lancinante qui montait tout le long de son bras. Ce membre s’engourdissait de plus en plus et lui donnait d’abominables picotements. D’un air rageur, il jeta un nouveau regard sur sa blessure avant de sursauter sous le sifflement aigue de la Druide. Quand la créature se pointa, Sven ne pu réprimer une grimace. Quel mauvais goût pour le choix d’un animal de compagnie, dit donc! S’il en avait eu un, il n’aurait certainement pas opté pour ÇA! Mais bon, chacun ses trucs!

Quand la druidesse fit les enjambées qui la séparaient de lui, Sven réprima l’envie de reculer. Il la regarda faire pendant qu’elle examinait sa main blessée, et ne put s’empêcher de penser qu’elle était vraiment très petite…. Pour être exacte, c’était lui qui était plus grand que la normale, mais il ne s’habituait jamais aux tailles féminines standards. Il fronça les sourcils quand elle planta son regard dans le sien, ne sachant pas pourquoi elle avait un air si sévère, tout à coup. Elle lui donnait des ordres? Le démon fit la moue mais ne répliqua rien, se contentant de se laisser tomber par terre pour s’asseoir, adossé contre un arbre. Ainsi, il avait la drôle d’impression d’être un enfant. Plutôt désagréable…

Quand le singe lui montra les crocs, il se contenta de l’ignorer. Après tout, il ne devait pas se mettre en colère, au cas où la dame ne voudrait plus l’aider… Il jouerait donc au pauvre malade innocent le temps qu’il faudrait pour être de nouveau sur pied. Il la laissa donc lui faire un bandage en serrant les dents sous la douleur des épines et écouta ensuite ses dires. Que de mauvaises nouvelles à perte de vue! –Et au sens propres.- Sa vue se brouillait toujours un peu plus, comme s’il se trouvait dans un brouillard très épais. S’en était même douloureux.

- Il est totalement hors de question que je me coupe le bras, marmonna-t-il dans un souffle difficile. Comment fonctionne le procédé d’extraction du poison, dites-moi?

L’envie d’une boutade douteuse lui fut irrésistible :

- Vous n’allez quand même pas vous y prendre avec votre bouche, non?

C’était de mauvais goût, bien sûr, mais il n’avait pas pu s’en empêcher, malgré la gravité de la situation. Il voulut rire bien fort, mais il n’avait pas assez d’air dans ses poumons pour le faire, ainsi toussa-t-il un peu, propageant davantage de douleur dans ses muscles. C’était sans doute ça, le karma…

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