Il était une fois

C

omme d’habitude depuis un certain temps, il faisait beau. Le soleil étincelait dans le ciel. Aucun nuage ne venait déranger le ciel bleu. Les oiseaux chantaient, indiquant ainsi que tous se passait bien dans les alentours. Les prédateurs courraient après leur gibier et les feuilles tombées au sol crissaient sous le pas des animaux et autres créatures qui peuplaient la forêt. Parfois, on pouvait croiser en chemin une biche ou un lapin aux yeux vides allongés sur la terre. Du sang coagulait autour d’eux, signe qu’une bête féroce venait tout juste de passer par là. Bref, tout allait merveilleusement bien.

Ce matin, Neelahn s’était levée de bonne heure. Accompagnée de Tigrou, son tigre blanc, elle était occupée de dépecer des lapins. A présent, elle était assez âgée pour se débrouiller seule et faire ce qui lui plaisait. Et lorsque ses amis les druides cherchèrent un volontaire pour se rendre à Naturalia afin de faire du commerce, l’elfe avait levée bien haut la main. Elle s’était ensuite appliquée à faire une liste de tous ce que ses amis désiraient, demandant souvent à ce qu’on lui épèle les mots. Il y avait tellement d’objets qu’elle ne connaissait pas et certains lui semblaient si extravagants !

« Et cette fois-ci, on y restera quelques jours, pour visiter les ta… tavri ? Non. Ta… To ? Ah si ! Tavernes ! »

Tigrou se renfrogna. Pour lui, ce n’était pas une bonne idée. Cela se voyait dans ses yeux. Les druides avaient conseillés à la jeune demoiselle de ne pas passer trop de temps en ville. Les « étrangers » n’aimaient pas beaucoup les druides. Ils les considéraient comme des animaux. Mais même les animaux avaient autant de raison que les autres de vivre et penser… Et il fallait sans doute vivre parmi eux pour comprendre.
Neelahn avait bien conscience et comprenait que certaines personnes ne possédaient pas un esprit très ouvert. Mais elle restait persuadée qu’en leur montrant, ils comprendraient. Ses amis étaient bien trop pessimistes ! Certes, son père était mort en ville mais ce n’état pas une raison pour généraliser les choses. Il était tombé sur un être égoïste qui ne pensait qu’à faire du profit.

« Allé, plus que deux ! »

Les mains rouges de sang, elle chantait des comptines pour enfant. Munie d’un couteau dans sa main gauche, Neelahn exécutait des gestes précis et fluides. Elle dépeçait les lapins avec une facilité déconcertante et Tigrou la regardait faire avec de grands yeux. Pourtant, tout ceci n’était que le fruit d’un travail exécuté depuis plus d’un siècle et demi. Son père lui avait appris à tendre des petits pièges pour capturer le gibier et à tanner des peaux.
De temps en temps, l’elfe lança à son familier un morceau de chair. Elle le contempla ensuite bondir sur sa proie et déchiqueter violemment sa nourriture. Puis, elle éclata de rire et Tigrou rugit, comme si lui, n’y trouvait rien de drôle, ce qui était vrai. Mais Neelahn, pour une raison obscure, trouvait cela très amusant. Et à vrai dire, il y avait une quantité de choses infinies qu’elle trouvait « amusant ».

« Ne me regarde pas comme ça ! Ce n’est pas de ma faute si tu es drôle ! »

Une nouvelle fois, Tigrou rugit. Les oiseaux se trouvant dans le coin déguerpirent à toute vitesse en piaillant mais Neelahn, quant à elle, resta joyeusement assise à côté de son animal préféré et poursuivit gaiement son ouvrage en chantant.

La jeune mage rouge marchait tranquillement dans la forêt. En herboriste avertie, elle y allait régulièrement. Après tout, c'était une zone remplie d'ingrédients gratuits pour ses potions. Elle était encore loin de maitriser cet art à la perfection mais faisait tout pour que ceci s'arrange. Elle voulait arriver à la cheville de l'enchanteresse ultime. Tant qu'elle n'aurait pas atteint cet objectif elle poursuivrait sans relache sans tache.

Sa nature elfique appréciait particulièrement ses promenades dans les bois. Il faut dire que l'air y était agréable et le calme du lieu bien plus apaisant que celui du cimetière, deuxième endroit où elle y est souvent. La Tour n'arrive qu'en troisième position.

Ambrosia écoutait les chants des oiseaux tout en ramassant auprès d'un chêne centenaire de la mousse, du lichen mais aussi des champignons. Il ne lui manquait plus qu'un seul ingrédient et elle pourrait faire une petite potion soporifique. Cela lui était toujours utile, tout comme les potions de soin, en cas d'attaque de brigands ou de mages noirs. Elle pouvait bien sûr les acheter en herboristerie mais sa bourse ne le permettait pas trop actuellement.

Habillée de sa robe rouge, les cheveux chatains mordorés lachés sur les épaules, elle reprit sa promenade pour trouver ce qu'elle désirait. Elle marchait tranquillement lorsqu'elle entendit d'abord un chant. Surprise et contente à la fois de voir qu'elle n'était pas la seule à s'amuser dans ce lieu, elle se dirigea dans la direction de celui-ci. L'alchimiste avait entendu dire que ce lieu serait habité par des druides. Elle n'en avait jusqu'à présent jamais rencontré. Elle se demandait si aujourd'hui, cela changerait. Après tout, ils avaient le même objectif non? Enfin plus ou moins...

Au bout de quelques minutes de marche, elle dut se stopper. En effet, un rugissement venait de la saisir. La personne était en danger assurément. Elle quitta l'allure tranquille qu'elle possédait jusqu'à présent pour se mettre à courir. Mais lorsqu'elle fut à destination, elle se stoppa stupéfaite. L'animal n'attaquait personne... Et la jeune fille continuait à chanter. N'avait-elle pas peur? Précautionneuse, elle s'approcha d'eux prête à utiliser son contrôle de la terre pour se protéger.

"Tout va bien?"

Sa voix ne semblait guère rassurée, faut dire qu'elle n'avait jamais croisé jusqu'à présent de tigre... Donc ses sens étaient quelque peu apeurés. Elle n'avait pas envie de se battre. Mais se défendrait assurément. Ses yeux verts ne quittaient pas la bête. Elle était écœurée par les cadavres de lapins autour d'eux.

"Vous ne savez pas où je peux trouver de la pulpe ferreuse?"

Il s'agissait du fameux ingrédient qui lui manquait. Cela avait l'apparence d'un gros caillou blanc sauf que c'était super spongieux et vivait exclusivement dans des champs de fougères...

« … et ils tressèrent les crinières des poneys en chantant, lalala… »

Neelahn avait quasiment terminé. S’arrêtant un instant, elle se rappela avoir oublié d’apporter de l’eau. Elle avait bien une gourde d’eau dans sa sacoche mais celle-ci était réservée à épancher sa soif et non à se laver. Elle balaya des yeux les alentours et ne trouva rien pour s’essuyer.
Après avoir haussé les épaules, elle poursuivit joyeusement son travail. Comme elle était en train de se demander ce qu’elle allait manger ce soir et qu’elle chantait en même temps, elle n’entendit pas l’inconnue débarquer. De toute façon, en forêt, on ne risquait pas grand-chose (si bien entendu on avait la capacité de se transformer en un oiseau ultra rapide, ce qui, rappelons-le, n’était pas forcément à la portée de tout le monde…).

« Oh ! »

Si l’inconnue ne lui avait pas adressé la parole, elle aurait probablement pu continuer son chemin sans que Neelahn n’eût vu quoi que ce soit. L’elfe dévisagea un moment la jeune personne qui se tenait en face d’elle. Elle ne l’avait jamais et sa robe rouge laissait deviner qu’elle ne devait certainement pas être une druidesse. Fouillant un peu dans sa mémoire, elle se rappela alors de ce qu’on lui avait appris. Elle se rappela alors que les mages rouges portaient souvent des robes… rouges…

« Oh ! » fit-elle donc à nouveau pendant que l’inconnue lui demandait des informations de localisation sur un certain ingrédient.

Neelahn se leva, regarda une nouvelle fois autour d’elle à la recherche de quelque chose où elle pourrait s’essuyer les mains. Ne trouvant rien, elle utilisa sa robe. Le vêtement était simple, de couleur gris. C’était un de ces habits que l’on portait lorsqu’on voulait se fondre dans la masse ou lorsqu’on savait qu’on allait se salir.
Toutefois, après s’être essuyé, Neelahn s’aperçut que seule l’eau claire pourrait lui permettre d’enlever tous ce sang incrusté sur ses mains. Tant pis. L’inconnue ne semblait pas être choquée ou gênée. Et tant mieux car la druidesse n’aurait certainement pas compris pourquoi elle aurait été puisque ce fut son lot quotidien de travail…

« De la pulpe ferreuse… Hum… Ça me dit quelque chose… C’est une plante, n’est-ce pas ? »

Si c’était belle et bien la plante à laquelle elle pensait, Neelahn pouvait facilement en faire pousser…

« Dîtes… vous êtes une mage ? »

Avec ces grands yeux brillants, elle avait l’air d’être comme une enfant devant son cadeau. Il n’était pas difficile de devîner qu’elle avait mille et une questions à poser et qu’elle se retenait de toute ses forces pour ne pas les exploser et envahir la jeune inconnue. D’ailleurs, elle était sacrément jolie avec sa belle robe et ses magnifiques cheveux. Tout d’un coup, Neelahn se sentit affreusement moche à côté d’elle et eût l’envie de se faire toute petite. Ce matin, n’ayant pas prévu de faire une rencontre, elle n’avait pas pris la peine de se faire jolie. Elle s’était simplement brosser les cheveux et y avait accrochée une fleur (qui était désormais tachée de sang suite à son travail) et avait enfilé une de ses robes les plus moches, sachant qu’elle allait rapidement se salir.

« Tigrou, viens dire bonjour à la dame. Ce n’est pas très poli de rester dans son coin. »

Mais comme d’habitude, le tigre blanc se contenta de rugir. Il vînt cependant s’asseoir auprès de son amie, dévisageant l’inconnue à la robe rouge d’un œil méfiant.

"Tout à fait. C'est une espèce de mousse pour être exacte."

Penser à autre chose. La jeune femme tentait désespérément d'obéir à ses pensées mais elle restait obnubilée par le sang présent sur les mains de son interlocutrice mais aussi tout autour d'elle. Oh ce n'était pas la première fois qu'elle en voyait. Elle s'était déjà blessée et avait déjà blessé autrui... Et puis en tant qu'achimiste, certaines potions exigeaient qu'elle en utilise... Mais elle était toujours écoeurée quand celui-ci était présent en grande quantité.

Sa question resta sans réponse pendant quelques secondes. Ambrosia était toujours surprise de voir que certains ignoraient son ordre du fait qu'elle le porte tous les jours en étendard. Chassant ses pensées morbides, évitant de regarder les cadavres de lapins, elle toussota afin de se donner un peu de contenance et répondit d'une voix un peu tremblante :

"Oui, je suis une mage rouge pour être exacte."

Si elle avait des questions, elle y répondrait sans souci mais pour le moment, elle ne voyait pas quoi dire de plus. Elle n'allait pas partir dans de longs discours sur les différences entre les trois ordres tant que son interlocutrice ne lui demandait pas. C'était assez barbant après tout voire totalement soporifique.

Ambrosia paniqua. Venir lui dire bonjour? Non, non. Ce n'était nullement nécessaire! Le rugissement de l'animal la fit trembler comme une feuille. Son coeur battait à tout rompre dans sa poitrine. Ses mains étaient devenues subitement très moites. L'animal bougea et vint s'asseoir. La mage rouge se rendit compte qu'elle était en apnée pendant de longues secondes au vu du manque d'air qu'elle ressentait subitement. Elle était tellement tétanisée par la majesté du tigre qu'au final, elle avait littéralement cesser de vivre le temps qu'il s'était mis en mouvements.

"C'est votre animal de compagnie?"

La stupeur était bien réelle. Comme une hébétée, elle reprit :

"Vous n'avez pas peur qu'il vous croque? Vous avez réussi comment à le domestiquer? Un ensorcellement?"

Ses joues s'empourprèrent subitement de honte. Voilà qu'elle l'envahissait de questions. C'était vraiment très mal polie. Elle toussota et murmura :

"Je m'appelle Ambrosia Mayfair et vous? Vous habitez ici?"

« Oh ! »

Neelahn avait raison ! C’était bien une mage rouge ! Ah ce qu’elle était contente ! C’était la première fois qu’elle en voyait une ! Elle devait sans doute connaître Naturalia comme sa poche ! Elle allait pouvoir lui recommander des lieux sympas à visiter.

« Animal de compagnie ? Euh… c’est mon ami, mon familier si vous préférez. »

« Animal de compagnie » ? Quel drôle de nom. Neelahn n’avait jamais entendu ce genre de chose auparavant. Elle vit Ambrosia complètement paniquée par Tigrou. L’elfe ne comprenait pas pourquoi, sans doute parce qu’il était à côté d’elle du matin au soir.

« Bah euh… c’est Tigrou, quoi… »

Neelahn avait pour habitude de parler, parler et encore parler. Elle trouvait toujours quelque chose à dire, même sur des sujets ennuyants et inintéressants. Mais cette fois-ci, les répliques de la mage rouge la laissèrent sans voix. Elle repensa aux paroles de la jeune femme, tentant de lui fournir une autre réponse que des « Bah euh… » et finalement, elle finit par penser qu’Ambrosia était un peu insultante.

« Tigrou me suit de son plein gré. » dit-elle d’un ton catégorique.

Si Ambrosia n’avait pas eu cet air aussi ignorant, Neelahn aurait été sans doute folle de colère à l’idée qu’on put penser d’elle qu’elle était un monstre. Mais ce ne fut pas le cas. Et apparemment, la mage rouge n’avait pas coutume de croiser sur son chemin des animaux tous les jours. En même temps, cela ne surprit pas la druidesse. La plupart des bêtes à poils n’aimaient pas les villes. Pas assez de verdure, trop d’hommes, …

« Moi, c’est Neelahn, enchantée. »

Voir la mage rouge rougir comme si elle avait posé une question sotte (et ce fût le cas) suffit à radoucir la druidesse qui retrouva rapidement son entrain. Elle n’était pas du genre rancunier et après tout, on ne pouvait pas tout savoir dans la vie !
L’elfe se souvînt alors que la mage rouge cherchait de la pulpe ferreuse. Se concentrant un peu, une sorte de mousse apparut sous ses pieds. Puis, après avoir fait un énorme sourire à Ambrosia :

« Voilà ! Par contre, je sais pas trop ce que vous voulez en faire… Je trouve ça pas très esthétique, personnellement… Tigrou, ça suffit ! Arrête de l’embêter, tu ne vois pas que tu lui fais peur !? »

Pour s’amuser, Tigrou s’était mis en position d’attaque, révélant ces crocs. Voyant que la mage rouge était mal à l’aise en sa présence, il se faisait un plaisir fou d’en rajouter davantage. Mais Neelahn vînt le tirer par une oreille. Il lui donna un petit coup de patte pas bien méchant et se renfrogna. L’elfe lui sourit et lui gratouilla gentiment la tête.

« Vous pouvez le caresser, si vous voulez. Il est tout doux. Il ne faut pas avoir peur de lui. Il ne mange pas les elfes, sauf s’il ne trouve pas à manger et qu’il a très faim. Moi j’adore poser ma tête sur lui quand je dors. Il est confortable, mieux qu’un coussin ! »

Un peu vexé par la remarque de Neelahn, Tigrou rugit, faisant piailler les oiseaux qui se trouvaient près d’eux. Et Neelahn éclata de rire…

Son ami... La mage rouge était effarée. Comment pouvait-on être ami avec un animal? Elle n'arrivait pas à le comprendre. Alicia Mayfair, la célèbre enchanteresse, était par le passé proche de son cheval mais surtout d'un dragon fée. Malheureusement, l'être est mort en même temps que sa maitresse. Du coup, Ambrosia n'en a jamais vu autrement que sur peinture. Elle aimerait bien avoir un dragonnet mais apparemment, c'est impossible actuellement.

Mais un tigre... Non... C'est bien trop dangereux! Elle aurait peur de dormir avec lui. Certes, au moins, elle ne risquait pas de se faire agresser... ni voler... Mais elle aurait trop peur de ne jamais se réveiller... finir en pâtée pour gros matou. A ce sujet, la demoiselle frissonna de peur. Mais afin de mieux comprendre leur relation, l'alchimiste lui posa des questions.

"D'accord. Vous l'avez rencontré où?"

Après tout, elle se demandait s'il y en avait beaucoup de son espèce sur Nelberaid. Quand elle était enfant et qu'elle vivait dans la forêt, la jeune mage adorait les ours... mais en voir un décapiter un de ses amis l'avait tout de suite refroidi. Elle était donc très admirative vis à vis du lien qui semblait attachée son interlocutrice à l'animal.

"C'est un très joli prénom."

Ambrosia était sincère, elle trouvait son nom très doux. Elle se demandait si elle avait relié le sien à la célèbre ange divin. Elle avait l'habitude qu'on la noie de questions une fois qu'elle se soit présentée. Son interlocutrice fit alors apparaitre l'objet de ses désirs. Elle allait s'en approcher mais elle s'arrêta net. En effet, Tigrou s'était mis dans une position qui la pétrifiait jusqu'aux os. Ses dents étaient vraiment impressionnantes quoi que très propres. Neelahn le morigéna. Elle en fut rassurée.

"C'est pour une potion. Je peux vous donner une si vous voulez."

Après tout, elle avait assez d'ingrédients pour cela. Cela serait une sorte de présent pour éviter de se faire bouffer. L'alchimiste essayait de calmer ses nerfs. Elle fit quelques pas et fut proche de l'animal au bout de longues secondes. La sueur collait sa robe dans son dos. Elle leva la main et après encore quelques secondes d'hésitation, elle finit par caresser l'animal.

"Vous avez raison. Il est très doux. Je suis bien contente qu'il ne mange pas ceux de mon espèce. Il mange des démons?"

Une vraie bavarde... une vraie interrogatrice surtout... Elle en avait presque honte mais c'était la curiosité et la fascination qui la poussaient à agir ainsi.

« Ici, en forêt. »

« Oh ! Est-ce vrai ! Avec plaisir ! Mais à quoi sert-elle ? »

« Vous pourriez me montrer comment vous faîtes ? »

« Mais non ! Il ne faut pas s’y prendre comme ça ! Ce n’est pas une petite fleur ! C’est un tigre ! Il faut le prendre dans ses bras et lui faire un gros câlin ! »

« Vous voyez ? Il est comme vous et moi. Il aime qu’on lui prête attention et qu’on le câline. A vous maintenant ! »

« TIGROU, t’es pas possible ! »

La jeune femme frissonna. Dans la forêt, il y avait donc animaux dangereux. Oh bien sûr, elle ne s'était pas attendue que le lieu soit habité juste de biches et de colibris mais un tigre... Ca, elle y avait pas pensé, il faut bien l'avouer.

"Oui, c'est tout à fait vrai. Elle aura pour but d'endormir toute personne qui la respire ou la boit."

La boire rendait l'action encore plus efficace mais rien que la respirer vous entrainait dans un petit songe de quelques minutes alors que grâce à l'ingestion, le petit somme durerait une heure minimum. C'était surtout une potion de défense voire de fuite! Car c'était bien là le but initial de la potion. La jeune femme sourit doucement.

"Oui, avec plaisir."

Elle était encore trop récente dans l'ordre pour avoir des élèves. Ambrosia était donc ravie de montrer un peu son savoir, vu que cela ne lui arrivait jamais. De plus, elle avait toujours pour coutume de faire plus de potions qu'elle n'en avait besoin au cas où l'une d'entre elles n'aurait pas l'effet attendu. Et puis avoir un peu de réserve n'avait rien de bien difficile et était en rien inutile. Mais avant de faire quoi que ce soit, l'alchimiste devait gérer sa peur avec le tigre.

Elle lui caressait donc doucement l'animal. La jeune fille ne semblait pas satisfaite de sa caresse. Elle fit donc une démonstration à la mage rouge. Celle-ci fut un peu choquée et paniquée à l'idée de devoir faire pareil. Cela lui semblait insurmontable. Ambrosia préférait presque traverser un lac de laves en maillot de bain ridicule ou manger du poisson avarié.

Mais avant qu'elle puisse décider de quoi que ce soit, Nee lui attrapa la main et la fit caresser vivement le pauvre animal... Enfin... pauvre c'était façon de parler... En effet, celui-ci très joueur, lui sauta dessus. L'archimage poussa un cri strident de frayeur et s'allongea au sol. L'animal était au dessus d'elle. Ambrosia n'osait plus bouger. D'une petite voix, elle demanda :

"Vous pouvez lui demander de se retirer... Je vous montrerais pour les potions après. J'ai plein d'ingrédients sur moi, je peux faire plein de tours de magie si vous voulez... mais par pitié, dites lui de me laisser tranquille."

Elle avait perdu tout de sa superbe. Elle se sentait fragile au plus haut point et elle haissait cela.

« C’est vrai ? »

De manière générale, les potions n’étaient pas des choses que l’on pouvait acquérir facilement. Souvent, on en trouvait au marché mais seuls les connaisseurs s’attardaient à ces étals car tout le monde savait que la plupart des marchands étaient des escrocs. Difficile pour un novice de savoir si une potion agissait donc comme elle le prétendait.
Neelahn ne s’y connaissait pas en matière de potion. Elle savait à peine empoisonner ses flèches, pas parce qu’elle ne s’y intéressait pas mais plutôt parce qu’elle n’avait jamais eu l’occasion de rencontrer quelqu’un pour lui apprendre les rudiments de l’alchimie.

« Oh oui ! Je serai ravie de voir tous ce que vous savez faire ! »

Décidemment, elle en avait de la chance ! Non seulement elle venait de tomber sur une mage rouge mais en plus, cette dernière était très gentille et acceptait de partager ses connaissances !

« Allé, viens mon gros. Tu vas finir par lui briser les os si tu continues à l’embêter comme ça. »

D’un coup de pied, Neelahn poussa doucement Tigrou sur le côté et tendit une main à la jeune femme pour l’aider à se relever. Elle lui souriait de toutes ses dents. Le tigre blanc, pendant ce temps là, ne bougea pas d’un seul pouce mais voyant que son amie insistait, il finit par laisser Ambrosia tranquille. En fait, il finit (enfin ?) par comprendre qu’elle irait mieux sans sa présence et décida d’aller faire un tour ailleurs. L’elfe le laissa faire sans demander quoi que ce soit. Il arrivait fréquemment que son animal ne soit pas systématiquement auprès d’elle. Après tout, c’était un tigre, pas un chien.

« On s’installe ici et vous me montrez ? Et ensuite, on ira à la chasse si vous voulez. Vous allez voir, c’est très distrayant. Puis on pourra se promener aussi. Vous pourrez peut-être trouver votre bonheur parmi toutes les plantes qui se trouvent ici. »

La druidesse s’aperçut ensuite qu’elle avait toujours la main ensanglantée. Elle s’essuya sur sa robe mais cela ne suffit pas à enlever toutes les taches présentes qui avaient séchées sur sa peau. Elle haussa les épaules et rit doucement.

« Désolée »

[Désolée de l'effroyable retard ma puce]

La jeune femme était sous le point de tomber dans les pommes. Elle était vraiment très effrayée par l'animal surtout depuis qu'il était sur elle. Ambrosia tachait de ne pas le laisser trop montrer mais elle tremblait actuellement comme une feuille un soir de grand vent. Elle réussit à trouver un compromis pour remettre la situation à son avantage. Donner des leçons d'alchimie à la druide ne la dérangeait pas. Elle aimait partager son savoir et n'hésitait pas à la Tour Naturelle de donner de l'aide à des apprentis. Elle la traiterait donc comme une élève.

L'alchimiste attrapa la main de la demoiselle et se redressa. Elle chassa quelques feuilles sur sa robe, remit quelques mèches en place et essaya de calmer le rythme rapide de son coeur. Elle ferma quelques secondes ses yeux, expira un bon coup et sourit de nouveau. Elle allait bien mieux, elle devait juste faire attention. Ses nerfs se détendirent d'autant plus lorsqu'elle vit le tigre s'éloigner. Elle espérait juste qu'il revienne pas par surprise dans son dos.

"A la chasse? Tu tues souvent des bêtes?"

Ambrosia était un peu stupéfaite il faut l'avouer. Nee avait l'air particulièrement fragile et inoffensive, l'imaginer pourchasser des lapins ou autres bestioles lui semblaient étranges... Ses yeux fixèrent quelques secondes le sol... les cadavres à leurs pieds lui rappelaient qu'elle était en effet une bonne chasseuse. Elle frissonna. Elle quitta le spectacle macabre et revint sur l'elfe.

"Il y a des champignons? Quelles sortes d'arbres? Je pourrais en effet faire du stock. Ca me serait bien utile."

Chercher des plantes lui plaisait énormément. Prendre de l'air pur lui remettait les idées en place. Elle se demandait si Alicia le faisait souvent par le passé. Elle sourit doucement. Son apparence n'était pas grave à ses yeux.

"C'est dommage que je ne connaisse pas de potions à base de sang d'animaux, cela aurait pu m'être utile."

La mage rouge esquissa un sourire quelque peu ironique et vint s'installer comme il se faut afin de commencer. Elle posa son sac et sortit un mortier, un pilon et quelques sachets d'herbe.

"Tu veux que je commence par quoi? une potion de soins? aveuglante? de respiration aquatique?"

[Aucun soucis]

« Hé bah ! Toi, on sait tout de suite d’où tu sors ! »

D’une voix douce et chantante, Neelahn taquinait gentiment Ambrosia. On voyait bien que la mage rouge vivait dans une cité et qu’il y avait quelqu’un pour faire le « sale » travail à sa place. L’elfe se demandait d’ailleurs à quoi ressemblait les chasseurs de Naturalia. Elle en avait sans doute croisé mais elle se dit qu’elle n’avait pas su les reconnaître. En tout cas, en entendant la question de la femme, les chasseurs n’avaient pas l’air de lui ressembler. La druidesse se demanda alors si les chasseurs de Naturalia étaient si différents d’elle. Elle s’imagina alors des hommes grands et costauds à l’air pas commode. Et elle se demanda alors si Ambrosia savait au moins d’où provenait la viande qu’elle mangeait tous les jours… Après tous, beaucoup de personnes grouillaient à Naturalia…

« A vrai dire, ce que j’aime surtout dans la chasse, c’est chercher le gibier et le poursuivre. Mais après, j’évite de tuer plus que nécessaire. Ce n’est pas par plaisir que je vais à la chasse mais plutôt par besoin. Et puis, Tigrou me prendrait pour du gibier si je ne me comporte pas un minimum comme lui. »

Elle éclata de rire en repensant aux innombrables fois où son ami la regardait en train de manger des fruits ou des légumes comme si elle était devenue folle. Au début de leur rencontre, l’elfe avait tenté de lui faire avaler des fraises ou de la salade. Finalement, elle comprit que le félin ne mangera jamais autre chose que de la viande. De temps en temps, rien que pour l’embêter, Neelahn s’amusait à déposer des tranches de carottes sur un poulet qu’elle donnait ensuite à Tigrou. Mais bon. Un carnivore restera toujours un carnivore…

« Oh eh bien tu pourras trouver dans la forêt tous ce qu’on trouve dans une forêt… Tu n’as qu’à demander ce dont tu as besoin puis je verrai si je peux t’aider. »

En fait, Neelahn pensait surtout à aider Ambrosia en faisant appel à son contrôle des plantes. C’était tout de même plus pratique que de faire cinq fois le tour de la forêt pour trouver une toute petite herbe qui ne poussait que pendant la pleine lune.

« On te traiterait d’être maléfique si tu faisais ça ! »

Même elle qui tuait des animaux pour se nourrir trouvait cela malsain de recueillir du sang pour faire des potions. En fait, la vrai raison pour laquelle elle trouvait cela mal était le gaspillage. Pour l’elfe, on ne tuait des animaux uniquement pour se nourrir et on évitait un maximum de jeter des « morceaux » car la bête aurait été morte pour rien. C’était peut-être une façon étrange de voir les choses mais c’était ainsi que cela fonctionnait dans sa « civilisation ».

« La potion de soin me semble très bien pour un début ! Comme ça, je pourrai me soigner facilement la prochaine fois que je m’écorcherai les jambes ou les doigts. »

Eh oui, lorsqu’on vivait parmi les arbres, ne pas avoir d’égratignure était impossible, sauf si on passait ses journées à se tourner les pouces. De plus, elle se disait qu’avec une potion de soin, il aurait été peut-être possible d’éviter que des gens proches ne meurent comme son père…

« Oh ! Moi aussi j’ai tous ça chez moi ! Sauf que je ne m’en sers pas pour les mêmes choses que toi. »

Après s’être assise en face de la mage rouge, Neelahn contempla les objets qui lui étaient si familiers. Pour le moment, la leçon était assez facile.

Le visage de la jeune femme devint rouge pivoine de confusion. Oui, elle venait de la ville et ne s'était jamais retrouvée à camper pendant des jours dans une forêt malgré qu'elle soit une elfe. D'ordinaire, elle n'en éprouvait aucune honte mais face à la druidesse, elle semblait bien ignorante de la vie simple. Mais elle allait changer cela en écoutant les explications de Nee.

Aimer courir après des animaux sans les tuer lui échappait complètement. Quel était le plaisir de faire une tache sans l'aboutir? En bonne perfectionniste, elle ne faisait jamais les choses à moitié. Mais il était vrai que si à chaque "jeu", elle devait tuer, la population animale, tout du moins Ambrosia le supposait, diminuerait de manière fort inquiétante et cela lui causerait des soucis. Ah oui Tigrou... Elle blémit quelque peu et le chercha du regard.

"Tu préfères chasser quel animal? Je suppose que certains sont plus difficiles à atteindre que d'autres, non?"

Aux yeux de la mage rouge, il était par exemple plus facile de chasser une biche ou un lapin qu'un oiseau mais peut-être qu'elle se trompait royalement. Elle n'était pas végétarienne. Elle appréciait les mets servis au restaurant de sa cité et s'était jamais posée la question de d'où ils venaient. Elle se demandait à présent si la viande de Naturalia n'était pas ramenée par des personnes comme son interlocutrice.

"Tu as déjà eu des commandes? Des personnes qui sont venues vers toi pour te demander de tuer telle espèce d'animaux à leurs places?"

Après tout, tout est possible, non? Donc elle posait la question au hasard ne sachant pas s'il y avait des chasseurs attitrés ou non dans les terres neutres. Elle écouta la demoiselle et hocha la tête. La source d'ingrédients semblait inépuisable, elle avait hate de la tester et en était toute excitée. Elle éclata de rire et murmura :

"C'est pas faux quoi que les mages noirs préfèrent le sang humain, de vierges de préférence d'après ce que j'en sais."

Oui, le sang était l'ingrédient de base des potions de Malificium au grand drame des mages neutres. Mais c'était un peu leur démarcation et fallait que celle-ci reste quoi qu'il arrive pour que les villageois ne confondent pas les deux statuts.

"Ah et pourquoi les utilises-tu alors?"

La surprise de l'elfe n'était pas feinte. Elle fouillai dans son sac pour sortir un ingrédient indispensable pour une bonne potion de soins : du sel de feu. Il se faisait rare de nos jours depuis la disparition du volcan mais dans ses cendres, il n'en restait encore au niveau de la pineraie carbonisée, il fallait juste être patient pour le récupérer.

"Alors pour te soigner, il te faut : du sel de feu, que tu trouves à la pineraie carbonisée ou à l'herboristerie mystique, ainsi ca calmera d'éventuelles brulures dûes au feu mais aussi à des poisons. En plus de cela, il te faut un peu d'eau, de la myrrhe. Tu peux m'en récupérer? C'est une herbe grimpante aux feuilles marrons légers et qui sentent super bons. Et un peu de lavande. Pareil, j'en ai pas sur moi. C'est une plante violette qui pousse au pied des chênes."

La liste des ingrédients était posée. Voyons si Nee lui trouverait ce qu'elle désirerait. Elle avait en tout cas déposé le sel de feu dans le mortier et attendait la suite.

N’avait-elle pas écouté ce qu’elle venait de dire ou n’avait-elle tout simplement pas compris ses propos ? Mais après tous, peut-être que ce n’était qu’une question de point de vue. Oui, c’était sûrement ça. Une question de point de vue. Pour la druidesse, chasser incluait le fait qu’il fallait tuer la bête. Or, comme elle venait de le dire, Neelahn n’aimait pas tuer. On ne pouvait pas non plus dire que cela la dérangeait mais elle préférait mille fois mieux donner une carotte à un lapin et le suivre discrètement jusqu’à sa tanière pour voir ses petits. C’était plus amusant. En fait, dans la chasse, c’était ça qu’elle aimait.
Alors, lorsque Ambrosia lui demanda qu’elle animal elle préférait chasser, Neelahn pensa aux petites créatures qu’elle adorait admirer. Elle pensa alors aux oiseaux avec leur magnifiques plumages puis, aux biches avec leurs jolis yeux et belle fourrure, … L’elfe réalisa alors qu’elle aimait tous les animaux, même ceux qui étaient dangereux. Et finalement, elle ne trouva rien de mieux que de hausser les épaules face à la question de la mage rouge.

Ensuite, elle l’inonda de questions. Elle lui parla de « commande » et autre chose qu’elle trouvait bizarre. Surprise par cette curieuse façon de pensée, Neelahn battit plusieurs fois des paupières. Elle n’était pas bien sûre de comprendre de quoi la femme voulait parler.

« Euh… non, pas à ma connaissance. »

On demandait rarement aux druides des services (en tout cas, pour ceux qu’elle connaissait). Et puis, de toute façon, ils n’aimaient pas rendre services aux autres. La plupart des gens ne les aimaient pas et les considéraient comme des êtres inférieurs. Il était donc facile de comprendre pourquoi ils avaient tant de mal à intégrer la société. La plupart du temps, ils restaient dans la forêt, sortant de temps en temps pour faire du commerce à Naturalia. D’une certaine manière, ils avaient quelquefois des demandes. Il arrivait qu’une cliente demande si la prochaine fois, il était possible d’avoir tel ou tel produit. Mais ce n’était pas une commende à proprement dit. C’était plutôt une suggestion ou un service que l’on rendait à quelqu’un que l’on trouvait aimable, ce qui n’arrivait pas souvent.

« Argh… Dégueulasse… J’espère au moins qu’ils les vident bien de tout leur sang… T’imagines le gâchis sinon ? Je ne suis même pas sûre qu’on soit comestible et que notre peau puisse servir de fourrure pendant l’hiver ! »

Drôle de façon de penser que voilà. Mais puisque les animaux se faisaient tuer, pourquoi pas eux ? Bien entendu, si quelqu’un cherchait à la vider de son sang, Neelahn ne se laisserait sans doute pas faire mais pour elle, dans le monde, nul être ne pouvait être considéré comme supérieur aux autres. Pour elle toutes les créatures du monde étaient sur le même piédestal et pouvait avoir une utilité une fois mortes.

« Il faut que je me trouve rapidement un compagnon… Toi t’es toujours vierge, toi ? Ça fait peur quand même de savoir ça. Ça doit inciter les jeunes filles à rapidement se marier, non ? »

Plus Ambrosia l’arrosait de questions, plus Neelahn en faisait de même. D’une certaine manière, elles avaient des connaissances que l’autre ne possédait pas. Puis, lorsque la mage rouge lui demanda à quoi lui servaient les mortiers et les pilons si elle ne s’en servait pas pour faire des potions, la druidesse écarquilla les yeux.

« Incroyable ! Tu ne fais donc jamais à manger ? Hé bah ! On voit bien que tu habites dans une cité ! »

Pour Neelahn, il n’y avait que dans les cités grandes comme Bénécius qu’il était possible de s’occuper d’une seule chose, laissant les autres se charger du reste. Quoi que, dans son clan, il était aussi possible de fonctionner de la même manière. Cependant, l’elfe trouvait cela ennuyeux de toujours faire la même chose. Mais bon, encore une fois, ce n’était qu’une question de point de vue. De plus, il était difficile de comparer un petit groupe de personnes vivant dans la forêt avec une grande cité.

« Voilà ! »

Ambrosia n’avait qu’à demander et toutes les plantes dont elles avaient besoin apparu à ses pieds. Évidemment, comme Neelahn n’était pas la déesse de la nature, elle ne put faire fleurir un gros buisson de lavande. Elle parvint cependant à faire pousser une petite pousse qu’elle jugea suffisant pour faire la potion et la myrrhe, ne sachant pas à quoi s’accrocher, vînt s’enrouler délicatement autour des petites fleurs violettes.

« Dépêche-toi de les prendre, elles ne vont pas survivre plus de quelques jours. » conseilla-t-elle alors à Ambrosia

"Je t'avouerais que mes connaissances à ce sujet sont limitées. Je pense que seul le sang les intéresse. Je n'ai jamais croisé de mages noirs recouverts d'un manteau de peau humaine."

La jeune femme frissonna à cette idée. Son estomac joua de la salsa. C'était vraiment inimaginable à ses yeux mais avec les maudits avaient toujours une imagination débordante niveau sadisme et horreur. Donc tout était possible! En tout cas, elle espérait ne pas finir sur le dos d'un de ses ennemis.

Un rire cristallin se fit entendre. Ambrosia était touchée par la naïveté de la druide. Un compagnon... non, elle n'en avait pas. Animal ou humain, la solitude semblait la préférer à la société. Elle aimerait bien trouver l'amour de sa vie mais ce n'était pas sa priorité pour le moment. Elle devait d'abord augmenter son savoir. Quant à sa pureté ou non...

"Je suis seule."

Elle n'en dirait pas plus. Ses joues s'étaient empourprées. L'alchimiste était pudique, il fallait lui pardonner. Son intimité était un jardin secret qu'elle ne révélerait qu'à l'élu. Certains confrères la trouvaient ridicules. Mais elle se disait juste romantique. Nouvel éclat de rire. La demoiselle regarda son mortier et son pilon. Ceux-ci avaient connu diverses herbes mais rien de bien comestibles à son gout.

"Je vais essentiellement dans les auberges oui ou alors je participe au repas collégial à la Tour Naturelle. Je crois que j'ai jamais rien cuisiné de ma vie... oui, c'est bien cela, j'ai jamais préparé un repas. C'est lequel ton préféré?"

Après tout, autant en savoir un peu plus sur la druide niveau gout, elle pourrait ainsi lui offrir quelque chose qui lui plairait. Elle lui demanda des plantes spécifiques et quelques minutes plus tard, celles-ci apparurent devant elle. La jeune elfe sourit à son interlocutrice. Ce pouvoir était vraiment prodigieux. D'un geste délicat, elle cueillit ce dont elle avait besoin et les mélangea dans son mortier avec un peu d'eau.

"Il faut laisser reposer quelques minutes et après avec le jus, je rajoute un peu de violette et c'est bon. Tu pourras m'en faire apparaitre."

La jeune femme passa sa main droite dans les cheveux. Elle la fixa quelques secondes et demanda :

"Tu voudras un jour que je te fasse visiter la Tour Naturelle? Ou tu as une phobie de la ville?"

Elle éclata de rire. Imaginer une personne avec une peau humaine sur le dos était absurde. Ça l’était tellement que Neelahn n’arrivait pas à le concevoir. Elle n’était même pas sûre que cela pouvait être utile puisque les humains traquaient des bêtes à fourrure pour ne pas mourir de froid l’hiver.
Elle imagina alors une personne quelconque en train de dépecer un humain. Subitement, son rire cessa. Non. C’était impossible. Une espèce ne pouvait pas se dépecer entre elle. Ça n’avait aucun sens. Et pourtant, en regardant Ambrosia, Neelahn eut la désagréable sensation qu’avec les humains, tout pouvait être possible. La mage rouge en semblait convaincue. Toutefois, l’elfe se disait que ce n’était pas parce qu’elle avait l’air d’être sûre d’elle qu’elle avait automatiquement raison.
Oh et puis, pourquoi se tracassait-elle la tête avec de si sombres pensées ?

« Ah c’est vrai ? Pourtant, tu es en âge de te marier. En ville, je suis sûre que tout le monde doit dire ça. »

Pour une raison qui lui restait mystérieuse, Neelahn avait remarqué que les citadines avaient tendance à se marier très tôt et, de préférence avec un homme beaucoup plus âgé qu’elle. L’elfe avait toujours pensé que ces demoiselles avaient des goûts bizarres mais elle dut reconnaître qu’elle ne s’était jamais attardée à essayer de comprendre pourquoi il en était ainsi. Cependant, à chaque fois qu’elle croisait ce genre de couple dans les rues, elle se demandait toujours pourquoi les mariées avaient un air si triste ou si mélancolique. Oh bien sûr, certaines femmes semblaient heureuses mais bien rare étaient celles qui paraissaient s’être mariées par amour.

« Oh tu as bien de la chance ! Tu dois être une noble ou quelqu’un de très important, je suppose ? »

Les deux jeunes femmes venaient d’aborder un sujet beaucoup plus distrayant : la nourriture.
Ah ! Ce que Neelahn aurait aimé se passer de cette corvée ! Oh bien sûr, de temps en temps, elle prenait plaisir à mijoter des petits plats mais la plupart du temps, elle trouvait que cela était une perte de temps, surtout qu’elle ne savait jamais quoi préparer. La plupart du temps, les repas étaient pour elle une corvée et rapidement, par manque d’imagination, elle se retrouvait à manger la même chose le matin et le soir.
Mais bon, c’était assez bizarre. Même si Ambrosia avait la chance de ne pas avoir à subir cette corvée tous les jours, Neelahn trouvait cela assez étrange qu’elle ne savait pas faire la cuisine. Pour elle, c’était comme nager ou reconnaître les champignons comestibles ou pas. C’était essentiel.

« Moi j’aime tout, du moment que c’est bien préparer. »

Côté gastronomie, l’elfe n’était pas compliqué. Elle mangeait volontiers tous ce qu’on lui donnait. Elle aimait tout et savait faire preuve d’ouverture d’esprit lorsqu’on lui présentait un nouveau plat qu’elle ne connaissait pas.

« Oui, tout de suite ! »

La violette… ça aussi, c’était pas mal dans un gâteau. Bon, évidemment, il ne fallait pas en abuser car ça en devenait très vite écœurant. Mais quand c’était bien dosé, ça pouvait être succulent.
Enfin bref ! Suite à la demande de la mage rouge, Neelahn fit apparaître la fleur juste à côté du mortier. Elle chercha ensuite dans son sac de quoi écrire et retranscrit tous ce que la femme lui avait dit. Et tout en grattant sa plume sur son parchemin, elle hocha vivement de la tête lorsqu’Ambrosia lui proposa de visiter la Tour Naturelle.

« Ce serait formidable ! Mais tu crois que je pourrais y entrer ? J’ai toujours cru que cet endroit réservé qu’à des gens importants. »

[Désolée de l'effroyable retard, j'étais certaine de t'avoir répondu entre temps ^^' Désoléeeeeeeeeeee]

Un éclat de rire jaillit des lèvres de la jeune femme. D'autres se seraient surement offusquées d'une telle remarque de la druidesse. Après tout, c'était une remarque fort intime mais néanmoins vraie. Oui, à son âge, beaucoup de femmes avaient des enfants et un mari... Elle était belle... elle devrait donc être amoureuse mais ce n'était nullement le cas. Oh, elle n'était pas aussi pure que de la neige intacte mais elle préférait être seule pour le moment.

"Ce n'est pas faux mais l'amour viendra quand il sera nécessaire que cela soit le cas."

Elle lui fit une légère grimace pour changer de sujet. Elle préférait se vouer à sa carrière même si lorsqu'elle atteindra le poste de chef aimer un homme serait encore plus compliqué pour elle. Ambrosia n'avait pas envie de vivre des amours interdits ou douloureux comme l'enchanteresse. Elle voulait vivre un amour éternel... et était donc très exigeante.

"Noble non. Je vis bien grâce à mon magasin d'herbes qui m'apporte des revenus constants c'est tout. Ma famille est une lignée de mages blancs qui préfère vivre à l'orée des bois que dans la ville. Donc la richesse ne m'est pas héréditaire."

L'herboristerie mystique reprenait sa réputation de jour en jour et ses revenus s'en retrouvaient du coup allongés pour son plus grand plaisir. Mais elle faisait attention à chaque pièce pour ne pas se ruiner par idiotie ou perte de réalité.

"Après, je suis un haut rang de mon ordre mais pas encore suffisamment forte pour être la chef ou la conseillère de mon dirigeant actuel."

Elle lui sourit doucement. Le sujet de la nourriture vint. Elle ne cuisinait pas mais savait apprécier la bonne chair même si elle arborait une silhouette svelte. Elle sourit à Neelahn. Elles étaient pareilles à ce niveau là. Ambrosia continuait à préparer sa potion et grâce à l'aide de la druidesse, elle put la finir aisément. Elle écrasa la violette dans le mortier et ajouta celle-ci à sa préparation. Elle mélangea encore un peu et disposa le contenu dans deux flacons : un chacun.

"Tiens, c'est prêt. Tu seras mon invitée par conséquent, tu pourras y aller sans souci. Sinon, oui, c'est réservé exclusivement aux mages rouges si on y est pas accompagné. Tu veux qu'on parte dès maintenant?"

Neelahn suivait du regard chacun des mouvements qu’Ambrosia effectuait. Apparemment, la potion n’était pas difficile à confectionner. Il suffisait simplement de posséder les bons ingrédients. Il n’y avait même pas de formule à prononcer ni de geste complexe et mystique. Tant mieux ! Maintenant, la druidesse avait appris à produire des potions de soin. Elles ne permettaient certes pas de soigner d’énormes blessures de guerres mais pouvait atténuer des brûlures dues au feu ou d’adoucir les effets de poisons. C’était déjà une bonne chose.
Neelahn mémorisa avec soin tous les ingrédients et tous les gestes que la mage rouge avait effectué. Même si elle se comportait parfois de manière illogique, on put tout de même reconnaître qu’elle apprenait vite et qu’elle avait bonne mémoire.

« Merci. »

La druidesse prit délicatement le flacon que la femme lui tendait. Elle avait bien remarqué qu’elle en avait remplit deux mais elle préféra lui laisser le deuxième flacon. Après tout, c’était son œuvre. Il fallait bien qu’une partie lui revienne ! De plus, Ambrosia lui avait expliqué que le sel de feu ne pouvait qu’être trouvé que dans la pineraie carbonisée ou à l’herboristerie mystique. Neelahn en avait donc déduit que c’était un ingrédient rare et cher. Alors, bien entendu, elle tenait absolument à laisser une partie de la potion à sa créatrice.

« Ça serait un honneur pour moi de pouvoir venir la Tour Naturelle. »

Ah ! Ce qu’elle en avait de la chance ! Elle venait d’avoir l’occasion de visiter une fabuleuse et célèbre construction. Jamais elle n’avait pu que cela aurait été possible ! Pourtant, lorsque la mage rouge lui demanda si elle voulait partir dès à présent pour Naturalia, elle tourna doucement la tête de gauche à droite.

« Non, pas maintenant, je suis vraiment désolée. Je dois préparer mon sac de voyage d’abord et les druides doivent me donner des produits à vendre au marché de Naturalia. Ils n’ont pas encore fini de coudre les fourrures et je dois moi aussi de mon côté aller chercher de la matière première. »

Elle était un peu déçue de devoir décliner l’offre de la mage rouge et cela se voyait sur son visage. Cependant, elle avait des obligations et les obligations entrainaient parfois quelques sacrifices.

« Mais nous pouvons remettre cela à plus tard, qu’en dis-tu ? Je t’enverrais une missive quand j’aurais l’intention d’aller à Naturalia et on pourra s’organiser une journée ensemble ? J’adorerais que tu montres les petits coins sympa de la cité. Après tout, je suppose que c’est partout pareil, n’est-ce pas ? Je suis sûre qu’il y a des endroits très sympas mais il faut avoir habité quelques années pour les découvrir ! »

Assise en tailleur, Neelahn se dandinait doucement de gauche à droite. Ses yeux pétillaient à l’idée de tout ce qu’elle pourrait faire à Naturalia. Elle irait manger dans les tavernes, visiter la fameuse Tour Naturelle et ferait des emplettes. Et cette fois-ci, elle y passerait autant de temps qu’elle le voudrait !

[Petit post de cloture vu qu'il faut qu'on se sépare dans celui-ci. On fait la suite quand tu veux ^^ Tiens moi au courant via mp]

La jeune femme ne fut pas déçue qu'elle refuse son invitation. Elles avaient tout le temps de visiter la Tour Naturelle. Son invitation n'était pas éphémère, ni limitée dans le temps. La mage rouge aussi avait des obligations. D'ailleurs, on devait surement s'inquiéter de ne pas la voir depuis un petit bout de temps. Elle devait aussi aller dans son magasin histoire de voir quelles potions s'étaient vendues et celles qui manquaient à présent. En tout cas, elle avait aimé ce moment riche en émotions. Neelahn était une personnalité fort attachante.

"Je veux bien que tu me montres les fourrures que vous faites à l'occasion. Je pourrais éventuellement t'en acheter, on a toujours besoin de vêtements chauds pour nos voyages dans les montagnes afin d'y récupérer des ingrédients rares et glacés. Et puis, une peau de bête est toujours très agréable à sentir sous les pieds au lever."

Ambrosia était sérieuse et sincère. Elle se leva et ramassa ses affaires. Elle jeta un rapide coup d'oeil au ciel qu'elle pouvait entrapercevoir entre deux arbres. La lumière du jour commencait à bien décliner. Elle n'avait pas vu le temps passé. Elle devait faire vite si elle ne voulait pas revenir en pleine nuit noire chez les siens.

"Je te ferais une visite complète de Naturalia. Ca marche. J'attendrais ta missive. Je possède un magasin d'herbes dans la cité. Je pourrais t'y passer quelques potions. Envois ta lettre à la Tour, c'est plus sûr pour que je la recoive. En attendant, prends soin de toi. Je vais préparer ma visite comme cela, tu verras une multitude de choses!"

Elle lui fit un sourire espiègle. Elle se demandait si elle emmenerait son animal de compagnie. Son tigre risquait de ne pas passer inaperçu dans la cité mais sa présence ne serait pas interdite. Et au pire, il pourrait toujours jouer avec le chien métallique de l'enchanteresse ultime dans le hall principal de son QG. Elle lui déposa un bisou sur le front et s'en alla en direction de la cité des mages neutres le coeur léger...

L'achimiste avait déjà hate de la revoir. Elle l'emmenerait à la Tour évidemment mais aussi surement à la bibliothèque, aux thermes, à la cascade! Bref, tout un programme qui elle espérait lui plairait!

[Terminé]

» Tit truc en plus qui était bien!
» Il étais une fois...
» Encore une fois ( terminé )
» Pour Lyn Xiang . Un évènement imprévu , pour une fois !

Il était une fois

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