J’aimais beaucoup me balader aux marchés de la ville blanche. Les gens y étaient agréables et l’ambiance semblait apaiser tous les mœurs. Je n’y allais pas souvent, alors je profitais de chaque passage pour voir ce que proposaient les marchands. Et entre deux achats j’allais m’assoir un peu près de la fontaine. Aux yeux de tous, j’étais quelqu’un de banal, j’étais habillé d’une tunique bleu, et un chariot m’accompagné. Après tout j’étais livreur de plantes médicinal, d’où ma présence dans les différentes villes. Du haut de mes dix-ans, je ne rêvais de rien, je voulais juste vivre ma vie de façon normal et logique, cependant, on ne faisait pas toujours ce qu’on voulait, surtout quand on a un détail qui peut tout faire flamber. Il se trouve que je peux commander le feu, ça c’était la dernière nouvelle. Car juste avant de venir à Bénécius, je sortais de la tour naturelle d’où j’ai eu une leçon sur la magie avec une mage rouge un peu bizarre mais qui m’a énormément aidé. Avant j’avais peur de ce feu qui était en moi et je voulais rien savoir de lui. Grâce à Bethdenn, je suis en mesure de l’appeler, bien que je n’ai aucune envie de finir ma vie en tant que magicien, je me disais que cela pourrais me servir un jour ou l’autre, fallait-il encore que je puisse le contrôler correctement.

D’ailleurs, ce jour-là, sur mon banc, je m’amusais à allumer une flamme de la taille de celle d’une bougie et de l’éteindre, et ce plusieurs fois. Que c’était étrange de ce dire qu’un élément aussi destructeur était enfermé dans un corps aussi frêle que le mien. Les dieux avaient un sacré sens de l’humour, pourquoi ne pas avoir donné ce don-là à un grand sorcier qui protégerait le monde. Moi je ne m’en sers qu’à allumer mon four à pain ou encore à m’éclairer, mais je me voyais pas du tout lançant des boules de feu à tout va pour protéger mon prochain et encore moins dans une guerre.

Sur le banc ou je me trouvais, je décidais d’arrêter de jouer avec le feu, même si j’avais l’avantage de ne pas me brûler, je ne voulais pas engendrer un désastre par ma maladresse légendaire. Je reposai ma main à côté de moi et regardait les gens qui passaient. Je pensais beaucoup aux héros d’antan et d’aujourd’hui. Peut-être que ce monsieur la bas en est un, es ce qu’une personne aussi illustre se promènerait comme ça dans les rues ? J’aimerai bien en croiser un, un jour. Même si je ne suis pas un guerrier, j’adorais les histoires autour de ces gens qui ont su se battre au moment voulu. Perdu dans mes pensée, je n’avais pas fait attention à ma main que j’avais reposé, la flamme sur mon pouce ne s’était pas éteint, et le banc commençait alors à en subir les conséquences…

Si elle devait faire la liste des choses qui finalement n'avaient pas changé, sa relation aux enfants devait bien arriver en tête de liste. Les garnements de tous poils devaient se reconnaître entre eux, même si l'un d'eux se retrouvait coincé dans un corps d'adulte. Lili était peut-être officiellement adulte mais tout le monde était d'accord sur le fait que c'était une sale gosse immature. La plupart du temps... Non parce qu'elle savait être sérieuse des fois mais elle ne croisait pas assez de personnes qui méritaient qu'elle fasse cet effort. Bref, tout ça pour dire que dès que l'elfe descendait en ville, et qu'elle avait le temps nécessaire, elle passait son temps avec les gosses de rue. Parce qu'ils méritaient bien qu'on s'intéresse à eux pour autre chose que les chasser. Parce qu'elle adorait s'amuser avec eux. Parce qu'une fois que vous étiez leur amie, vous aviez accès à ce que vous vouliez...

Le jeu d'aujourd'hui était un simple cache cache. Enfin... Simple. Juste sur tout le centre ville quoi. De quoi vous tenir occuper tout l’après avec une seule session ! Les gamins s'étaient égaillés comme une envolée d'étourneaux moins d'une demi-heure auparavant et, pour l'instant, elle n'était pas parvenue à mettre la main sur le moindre gosse. De toute façon, c'était pas bien grave, le prix du jeu, si elle perdait, était un gros sac de pommes. Quitte à faire, elle préférait largement perdre et les savoir avec quelque chose dans l'estomac.

L'elfe arrivait donc sur la place des marchés en scrutant la moindre cachette possible, prête à mettre la main au collet du premier gamin venu. Sauf qu'un éclat attira son regard scrutateur... Vers la fontaine là... Y'avait pas un bonhomme qui prenait feu...? Et il s'en rendait pas compte? Sans même ralentir ni s'arrêter, la jeune femme empocha une cruche sur l'étal de l'un des vendeurs, qui se mit d'ailleurs immédiatement à vociférer, continua sa route vers la fontaine, la plongea dans l'eau sans s'arrêter et... Aspergea copieusement Charly et son banc malmené. L'elfe attendit trente secondes en surveillant que rien ne redémarrait avant de se tourner vers le vendeur insistant, lui lançant la cruche dans les mains. C'était pas son affaire s'il avait deux mains gauches et ne la rattrapait pas.

-Oh! Ca va! La voila ta cruche !

Puis Lili se retourna vers son confrère, qu'elle ne connaissait pas d’ailleurs, et le jaugea du regard. Il n'avait pas l'air blessé. Mouillé mais pas blessé...

-Et vous là? Ca va?

Etant donné qu'elle venait de lui offrir une douche surprise et glacée, elle préférait y aller mollo mais on sentait bien le reproche dans le fond de sa voix... Du genre "mais ça va pas bien dans votre tête vous?"...

« Quoi ? »

A peine avais-je le temps de regarder devant moi, que je vis une fille courir vers moi avec une cruche d’eau. M’enfin, que fait-elle ? Ayant un caractère plutôt réservé, au lieu d’essayer de partir ou de l’empêcher de me rentrer dedans, je décidais tout simplement de me cacher derrière mon bras et c’est ainsi que je me retrouvai trempé de la tête aux pieds. En plus l’eau était froide. M’enfin, qu’es ce que j’ai faits ? Elle se tenait le devant moi me demandant si j’allais bien. Ben oui, j’avais bien envie de lui retourner la question moi. C’était alors que j’ai vu un petit partie du banc noir/braise et évidement une petite flammèche à la base de mon doigts, celle que j’avais oublié d’éteindre ou qui a pas voulu, tout dépend du point de vue. Cette fille n’a alors fait qu’une bonne action, et d’ailleurs heureusement qu’elle était là sinon j’aurais encore fait une gaffe, enfin, bien plus grande que ça. Je me levai devant elle avec un sourire, j’étais un peu gêné, mais je devais au moins la remercier.

« Merci mademoiselle…sans vous, j’aurais encore fait des bêtises…et je… »

Mon sourire innocent disparut lorsque je vis qu’elle n’avait pas l’air de plaisanter. Je baissai alors les yeux et accepta donc le sort qui m’attendait. Lequel je n’en savais rien. D’habitude c’était toujours moi qui venais en aide aux gens, ça faisait du bien d’être aidé à son tour. Plus le temps passait, plus je trouvais les gens de ce monde intéressant, je relevai ma tête vers le visage de cette fille pour mieux la contempler. Oui, elle avait l’air intéressant elle aussi.

« J’espère ne pas vous avoir retardé dans vos…activités. »

J’ai voulu lui serrer la main mais la flamme était toujours là au bout de mon doigt. M’enfin ! Je secouai vivement ma main pour l’éteindre, mais sans succès. Je réfléchis un instant pour me rappeler ce qu’on m’avait dit à la tour naturelle concernant ce genre de situation. Ah oui, que l’apparition des flammes dépendait de mes émotions et mes sentiments, il fallait donc, que je ferme les yeux, que je me concentre un peu et ça devrai faire l’affaire. Et avec un peu de bonne volonté, tout redevint comme avant sauf mes vêtements mouillés, j’avais pensé à augmenter ma température pour les sécher, mais…non, valait mieux pas.

« Je m’appelle Charly…je viens de Naturalia et j’ai des ennuis avec…ça. »

Je lui montrai la tâche noir sur le banc. Peut-être que cette explication suffirait. D’autant plus que quelques personnes s’étaient arrêté pour comprendre la scène.

Visiblement le bonhomme ne s'était vraiment rendu compte de rien. Ca se voyait à sa façon de la regarder... En fait, elle serait arrivée avec une massue pour lui administrer un grand coup derrière les oreilles qu'il aurait probablement eu le même air étonné. Mais l'eau fraiche de la cruche était déjà mieux qu'un ou deux kilos de métal non? Et puis ça avait eu le mérite de rapidement régler la question... Par contre elle s'était attendue à une autre réaction, plus explosive probablement puisqu'elle avait remarqué que ceux qui jouaient avec le feu avaient tendance à avoir un tempérament du même genre... Là, elle avait juste l'impression de faire face à un chien battu. L'elfe poussa un soupir résigné...

-C'est rien, vous êtes pas blessé, la ville a pas flambé, y'a pas de mal...

Lili regarda son collègue jouer avec le feu, du moins essayer de le maîtriser suffisamment longtemps pour ne pas la brûler s'il lui tendait la main. En relevant la tête elle remarqua ses marchandises toutes proches... Des herbes à plus savoir qu'en faire... Un contrôle élémentaire encore balbutiant... Il ne fallut pas longtemps pour que la mage fasse le rapprochement et comprenne qui elle avait en face d'elle... Mais elle garda le silence, le laissant se concentrer suffisamment pour qu'il puisse maîtriser sa flammèche. Lorsqu'elle ne risqua plus de se blesser, elle lui serra enfin la main.

-Lili... T'es un apprenti hein? C'est ça...?

De son coté il n'était pas difficile de deviner qu'elle appartenait à la même caste que lui... Si sa tenue était très garçon manquée et entièrement faite de cuir, un peu près du corps, les teintes étaient indubitablement rouges... Bref, si elle ne supportait pas de porter ces robes qu'elle trouvait parfaitement inadaptée au moindre mouvement, elle ne rechignait plus trop à porter la couleur des siens. Donc le rouge. Puis ça faisait ressortir ses cheveux et ses yeux...

-J'me souviens que j'avais du mal aussi au début. T’inquiète, c'était qu'un banc.

Visiblement le petit spectacle qu'ils avaient donné avait attiré les badauds. Du moment qu'il y avait du grabuge, les curieux affluaient toujours comme une nuée de moustiques sur un corps gorgé de vie... Et ça, ça l'agaçait souverainement.

-Vous avez jamais vu de mages rouges peut-être...?

Devant le ton impérieux, et l'air revêche, de la mage, les curieux ne mirent pas bien longtemps avant de se trouver une autre activité, se dispersant pour les laisser dans une relative intimité. Le visage qu'elle présenta à Charly était déjà nettement plus agréable. Pas forcément chaleureux mais moins revêche. Le plus naturellement du monde elle s'installa sur le banc, visiblement peu dérangée par l'humidité ou la suie...

-Tu t'es trouvé un maître pour ton feu?

Cette fille avait un sacré tempérament contrairement à lui, on pourrait presque croire qu’elle posséderait mieux le feu que lui, c’était incroyable. Lili…bon, il s’agissait surement d’un diminutif, mais ça lui allait bien. Rapidement j’avais compris qu’il s’agissait aussi d’une magicienne des éléments. Ca ne fera que la deuxième que je rencontre, à croire que cette caste m’était vraiment destiné. Mais je n’avais pas envie d’être lanceur de sort, tout ce dont je voulais, c’était qu’on me laisse à mes activités pacifiques. J’étais herboriste et ça me suffisait. Néanmoins, je pouvais toujours discuter avec un dès leur, histoire de faire connaissance ou d’en apprendre plus sur eux, il sont si différent des un des autres.

« Je ne suis pas magicien, j’ai juste ce…don, que j’ai et je le donnerai bien, car je ne sais pas quoi faire. Par contre, je suis herboriste, enfin, je livre des plantes à des particuliers, eux sont content, la plus part du temps, quand je ne casse rien, et moi aussi. »

Même si elle n’était pas encore très chaleureuse, bon, elle avait déjà meilleur mine que tout à l’heure, mais je gardais un sourire franc et sincère. Non pas qu’elle me plaise, ou quoi, c’était juste une marque de respect et de politesse. Je n’étais pas un héros, mais si par mon sourire, je peux apporter un peu de bon sens, alors je m’y pliais avec plaisir. Même si en général, les gens me faisaient peur surtout à une époque, bien avant que le feu m’embrase. Elle se mit à parler de maître du feu. Elle devait parler de ces types à longues barbes dans le robe blanche à soutenir les pyromanes et à les aider à contrôler un élément vraiment instable. Je n’avais rien de tel, et ce n’était pas mon objectif.

« A vrai dire, y a encore une semaine, j’avais peur du feu surtout du mien. J’ai rencontré une de vos consœur à la tour naturelle qui m’a appris à le contrôler, enfin un minimum, car avant c’était pas qu’un banc qui partait en fumer… et vous, vous faites quoi ici ? »

J’étais aussi quelqu’un de très émotif. Je venais de me rappeler un douloureux souvenir en parlant de ça. Mettre le feu à un morceau de banc pouvait être marrant à la longue, mais quand on met le feu à sa propre maison familiale et qu’au lieu de vous aider, votre famille vous traite de monstre et décide de vous abandonner…ça laisse des séquelle et d’ailleurs c’était la raison pour laquelle, je ne voulais pas de ce pouvoir. J’avais soupiré de tristesse avant de respirer un bon coup avant de reprendre mon sourire. Je regardais les gens que Lili avait remis en place. Timidement, je levais la main vers ceux qui me regardaient encore un peu pour le dire que tout allait bien qu’il n’avait rien à craindre et de manière plus discret, qu’ils n’appelaient pas la garde, il manquerait plus que ça.

Elle sentait que Charly était radicalement différent d'elle... Bon, d'un autre coté, y'en avait pas beaucoup de comme elle. Heureusement pour les autres d'ailleurs car il y aurait rapidement eu une épidémie de crises cardiaques dans la Tour de Cristal. La jeune femme trouvait aussi qu'il était assez éloigné des archétypes des mages manipulant le feu. Ceux-ci étaient bien plus sanguins et fougueux habituellement... Là... Le jeune herboriste lui paraissait bien plus poli et calme. Presque doux. Ce qui était assez étonnant à ses yeux...

-T'es né Magicien, désolée de te l'apprendre... Je te conseille de t'y faire ! Tu verras... C'est pas si terrible que ça.

Le ton n'était pas complètement nonchalant, il s'était un peu teinté de douceur... La jeune femme connaissait la sensation qu'il avait. En fait il refusait l'évidence, celle de ne pas être la personne qu'il aurait voulu être... Du coup même si Lili pouvait être un peu brusque dans sa façon de faire car elle était plutôt directe, le jeune mage put sentir que ce n'était ni méchant ni agressif. C'était seulement un conseil... Il valait effectivement mieux pour lui qu'il accepte pleinement ses facultés plutôt que de vivre dans le déni.

-C'est bien si tu commences à le maîtriser... Bientôt tu lui trouveras une utilité, j'en suis sûre. Et je te rassure... On a tous des débuts difficiles, y'a rien de bizarre à ça.

La jeune femme haussa légèrement les épaules. Elle pouvait comprendre que ceux qui manipulent le feu aient des débuts plus difficiles que d'autres, après tout, c'était leur pouvoir qui était le plus destructeur de tous. De son coté son humeur avait juste tendance à forcir le vent, pas à faire flamber toute une maison... L'elfe jeta un rapide coup d'oeil aux derniers badauds qui s'attardaient, visiblement soucieux du bien être de Charly... Ils n'enverraient certainement pas la garde, ce genre de petit incident était assez courant dans une ville accueillant des mages élémentaires... La jeune femme s'installa plus confortablement sur le banc, affichant clairement une attitude nonchalante.

-Oh? Moi? Ce que je fais dans la vie ou ce que je fais là maintenant?

Elle eut un léger sourire en coin typique des gens qui aimaient jouer des tours, que ce soit avec des mots qu'avec autre chose.

-En fait j'étais en pleine parie de cache cache. Mais j'ai pas la moindre chance de gagner aujourd'hui !! Sinon je suis larbin à la Tour Naturelle pour nos vieilles pontes.

En fait, cette fille me rappelais ma jeune sœur, pas tout à fait, mais elle avait quelques similitude, autant dans la mesure de ses paroles que dans sa façon de se tenir. Ma sœur était une femme volage et que par conscience fraternelle, j’essayais de faire en sorte qu’elle ne fréquente pas des gens malveillants, mes tentatives furent rarement écoutées et voir ma sœur ainsi sombré dans un cycle infernal me faisait mal au cœur. Bien qu’elle soit partie avec mon frère et mes parents, je pris les dieux, pour qu’elle soit heureuse et en bonne santé, elle n’était pas mauvaises, juste très influençable. Heureusement, Lili semblait être la partie la plus agréable de ma sœur et je souriais à l’idée de côtoyer une fille telle qu’elle fut dans mes souvenirs. Néanmoins, elle avait raison, je ne pouvais pas me permettre de cacher ce que je suis plus longtemps, car si mon pouvoir augmentait, il y a des chances que je ne le maîtrise plus.

«Vous avez raison, Je penses qu’il va falloir que je m’exerce de temps en temps, en zone non-peuplé de préférence. Mais j’avoue que je n’aime pas trop me rendre à la tour, bien que c’est la bas que je me sentirais le mieux pour m’exercer, j’ai l’impression de ne pas y avoir ma place encore. »

Puis vint son tour, sur ce qu’elle faisait là, elle jouait à cache-cache. C’était mignon et attentionné. C’était donc ça, les gamins qui courraient partout, moi qui pensais qu’il allait se passer encore quelques choses de grave. Ce jeu me fit rappeler que je détenais un second pouvoir qui se déclenché uniquement quand je voulais disparaitre aux yeux de tous, lorsque la peur et la honte planaient sur moi. Pour ce jeu, bien que ce serai tricher, je étais sûr de bien m’en sortir.

« Ainsi, vous vivez à la tour, d’après ce que vous me dites, ça ne doit pas être rose tous les jours…c’est peut-être pour cela que vous préférez venir jouer ici avec ces enfants, je les ai vu courir tout à l’heure. C’est…gentil de votre part. »

Je lui souriais en fermant les yeux, décidément cette fille m’amusait beaucoup, elle me faisait rappeler aussi à ces artiste de rue qui font rire les gens avec leurs mimiques et les blagues, peut-être ne se rendait-elle pas compte, mais elle me faisait oublier mes problèmes sur le coup. Je me demandais d’où elle pouvait bien venir, et où était-elle lorsque moi je m’enfuyais de chez moi ? En tout cas, elle avait l’air du personne à fort caractère mais j’étais sûr qu’on pouvait compter sur elle, il suffisait d’être son allié.

L'incident commençait déjà à être oublié par les gens aux alentours... Bon, restait juste le marchand qui ne parvenait pas à s'empêcher de jeter un regard méfiant à Bellinda toutes les cinq minutes. Des fois qu'elle se lance dans une carrière de voleuse de cruches peut-être? Cela arracha un ricanement à la jeune femme... Rien que pour le principe... Mais non. Elle n'était pas, ou plus, à faire ce genre d'incartades. De toute façon elle avait déjà suffisamment d'ennuis comme ça. La remarque de Charly lui fit lever un sourcil. A force elle croyait être la seule à trouver que la Tour n'était pas toujours terriblement accueillante. Même pour les siens.

-Ouais, c'est pas faux... Moi non plus je suis pas toujours très à l'aise là bas. Mais c'est à cause de certains occupants.

La jeune femme rigola sous cape en faisant signe à Charly de se rapprocher pour qu'elle n'ait pas à trop élever la voix.

-Et je me gêne pas pour leur faire payer !! Mais jamais méchamment bien entendu.

Elle ponctua sa phrase d'un sourire complice avant de se redresser. S'il ne la connaissait pas de réputation, ce n'était qu'une question de temps. Par contre sa remarque pour l'entraînement n'était pas entièrement faux. Sans être vrai aussi... La Tour avait été érigée par des mages pour des mages. Elle était donc tout particulièrement adaptée pour ce genre d'entrainements. Bon, d'un autre coté, son contrôle de l'air, elle l'avait exercé ailleurs. Mais elle était un peu un cas à part quand on réfléchissait à son professeur, le seul qui avait eu confiance en elle d'ailleurs...

-Tu sais, même si certains te font pas sentir à l'aise faut pas hésiter à t'imposer là-bas. Y'a des salles d'entrainements spécialement conçues pour ceux qui veulent maîtriser le feu. Ca te permettrait de t'entrainer en toute sécurité. Puis sont pas tous des monstres. Doit bien y en avoir un ou deux qui peuvent t'aider dans le tas. Sans être désagréables avec toi...

La dernière remarque de Charly la fit franchement rire. Pour sur que la vie n'était pas rose à la Tour Naturelle... Faite de cristal rose. Elle trouvait l'expression juste parfaite pour le lieux ! Il fallut quand même quelques longs instants pour que son hilarité se calme. Encore un peu essoufflée et les larmes aux yeux, la jeune femme bascula légèrement en arrière en calant ses coudes sur le dossier, laissant son regard se perdre dans les nuages.

-Faut bien s'amuser hein? Tu veux m'aider à les trouver?

Lili avait encore une fois raison, il ne fallait pas que je me tracasse la tête avec toute ces chose liée à la magie, je devais simplement aller à la tour et m’entrainer afin de ne pas blesser ou détruire tout ce que je touche. Je suivrais donc son conseil. Encore une fois, il m’était agréable de voir que tous les gens que je croisais n’étaient pas forcément mauvais, car je ne pouvais pas cacher que certains de mes clients profitaient de ma nativité et de ma gentillesse.

« Vous avez raison, dès que j’aurai un peu de temps pour moi, j’irais voir ce que je peux apprendre à la tour naturelle, pour le bien des autres et le mien. »

Lili avait un caractère spécial, c’était le genre de personne qu’on n’oubliait pas comme ça, et comme je pouvais le constater, elle préférait s’amuser que de devoir apprendre toute la journée avec ses confrères, comme par exemple, jouer avec les enfants du quartier. Ils devaient bien la connaître d’ailleurs et pour une fois, j’allais m’amuser un peu moi aussi, je n’avais aucune raison de ne pas accepter de l’aider à retrouver ces petits garnement. Je pouvais laisser mon chariot de plante là, il ne risquait rien. Je me redressais pour me placer face à l’elle.

« C’est partie ! A deux on devrait pouvoir s’en sortir. »

Elle et moi s’éclipsions dans les ruelles, je lui avais dit que j’en avais vu quelque uns partir dans cette direction. Les gens nous regardaient bizarrement, et étrangement je m’en moquais. Peut-être que la présence de Lili me protégeait, car habituellement, chaque regards étaient comme un poids pour moi, car je détestais déranger les gens et encore moins de me faire remarquer. En général, à ce moment précis, mon corps aurait réagis et je serais devenu totalement transparent ou partiellement. Car ne maîtrisant aucuns de mes pouvoirs, des fois, tout mon corps devenait invisible, sauf un bras, une jambe, ou des fois juste la bouche, et j’en passe. Peut-être était-ce aussi dû à ce que j’avais en tête, là je ne pensais à rien, juste à m’amuser et à retrouver les enfants.

« Combien ils sont exactement ? »

Oui car je venais seulement de m’intégrer au jeu et je ne savais rien des participants. D’après un chevalier que j’ai croisé, le résultat d’une bataille dépend du nombre d’informations que l’une autre l’autre équpies avaient et en général c’était celle qui en obtenait le plus qui pouvait prétendre à la victoire. Je me disais que pour les jeux ça devait être pareil.

Lili était peut-être plus vieille que Charly, ça ne se voyait pas physiquement. Déjà parce qu'elle était une elfe, aussi pour d'autres raisons sur lesquelles elle n'avait pas envie de s'appesantir aujourd'hui… Alors sa façon de la vouvoyer tout le temps commençait à l'agacer un peu. Oh, pas au point de la fâcher, il en fallait bien plus pour cela, mais elle n'allait pas supporter cela beaucoup plus longtemps. Et puis, franchement, même si elle avait peut-être un peu plus d'expérience que lui, ce n'était pas une raison pour s'adresser à elle d'une façon aussi révérencieuse…

-Depuis tout à l'heure je te tutoies… Pourquoi tu persistes à me vouvoyer…? Je suis pas une des vieux mage de la Tour hein…

Par contre le jeune mage la surprit dans le bon sens du terme en acceptant sa proposition de jeu… Même à deux ils n'avaient aucune chance de gagner, ce qui n'était pas plus mal pour les gamins, mais cela allait lui permettre de voir un peu ce qui se cachait derrière les manières bien polies qu'il affichait. Et avec un peu de chances il accepterait de partager les frais pour la mise. Il avait l'air suffisamment sympa pour comprendre la situation et mettre la main à la poche. Ce qui lui permettrait d'un peu mieux fournir les enfants que d'habitude…

-Une quinzaine facile…

L'elfe lui emboîta le pas dans une des ruelles, elle aussi complètement imperméable aux regards curieux, et parfois agressifs, de certains passants. Pour eux ces enfants étaient des nuisibles qui passaient leur temps à provoquer des ennuis ou à voler sur leurs étals. Ils ne cherchaient pas à voir plus loin et encore moins à les comprendre… Et ce n'était certainement pas Lili qui allait chercher à dépenser inutilement de l'énergie pour essayer de leur faire comprendre. S'ils en avaient été capables, ils l'auraient fait depuis longtemps et auraient fermé les yeux sur le vol d'une pomme plutôt que de crier à l'assassinat à chaque fois. Ces gamins ne volaient pas pour l'argent mais juste pour survivre, pour ne pas crever de faim dans les rues… C'était quelque chose qui ne changeait jamais…

-Mais ils sont doués pour se cacher ces saloupiots !

C'était dit avec plus de tendresse que d'énervement… Visiblement Bellinda aimait beaucoup ces enfants et elle essayait de les aider le plus souvent possible… La jeune femme laissa le silence s'installer entre eu alors qu'elle fouillait derrière un fouillis de tonneaux et de caisses qui aurait pu offrir une excellente cachette…

-Et sinon? Comment t'as fait pour atterrir chez les mages rouges exactement?

Lili faisait partie des rare personne à ne pas apprécier le vouvoiement, bah, c’était juste un avis, je n’avais donc pas l’intention de continuer, mais ce sera difficile, j’essaierais d’y faire attention. Surtout que ma nouvelle amie avait l’air d’être bien décider à me le faire remarquer de façon très persuasive. Je préférais donc de ne pas l’agacer, Néanmoins, rien ne m’empêchais de lui en parler.

« C’est une habitude que j’ai depuis toujours, comme je déteste déranger les gens afin qu’on me laisse tranquille. C’est pour moi une forme de respect aussi, vous, enfin, tu es mon ainé, tu as plus d’expérience, tu es une fille, ça fait trois bonnes raisons de te respecter. »

Je lui accordais un sourire tout en continuant à chercher les enfants. La recherche s’annonçait rude. Je chercherais dans les poubelles, les cartons, les tonneaux, derrière les rideaux en dessous des charrettes, et petit à petit, je me mettais à les chercher dans des endroits improbables, sur les toits, dans les puits, dans les étals. Mais je me rendais vite compte que je devenais idiot à force de ne pas me concentrer. Je m’efforçais à essayer de penser comme eux, mais la question de Lili vint me perturber durant le jeu.

« Je ne suis pas encore chez les mages rouges, depuis ma tendre enfance, j’ai évité de me frotter à tout ce qui est magique. J’en avais peur, et peut être encore un peu maintenant. A cause du don que tu as pu voir tout à l’heure, ma famille m’a abandonné en me traitant de monstre. Je me souviens très bien, c’était un soir, ou on était tous à Naturalia dans notre maison. Je ne savais pu ce que j’avais fait pour mériter ça, je crois que je n’avais pas balayé le rez de chaussé. Ma mère était devenu très furieuse et à voulu me battre une fois de plus, sauf que j’ai senti une grande chaleur m’emparer. Je n’ai jamais eu aussi peur de ma vie, je paniquais, je pleurais, j’implorais ma mère de m’aider. Tout mon corps était en flamme et ma maison s’enflamma à son tour. Ils sont tous sortie de la maison, me laissant à mon triste sort. J’avais perdu connaissance, et à ma réveille, j’étais au milieu d’un tas de cendre… »

Je venais de me rendre compte, que je venais de lui raconter la partie la plus sombre de mon existence comme si de rien n’était. D’abord je voulais me cacher, mais alors je me disais que cela me faisait du bien d’en parler à quelqu’un, même si cette personne s’en fichait par la suite. Ma famille et moi-même ne savions pas à l’époque que je possédais un tel don, la surprise fut totale. D’ailleurs, certaines personnes de Naturalia raconteront cet épisode en ragot et rumeur. Puis, pour changer de sujet, il voulait parler d’elle.

« Et vous…toi ? Ou étais tu avant d’aller à la tour naturelle ? »

La jeune femme prit la peine d'écouter les explications de Charly même si plus d'une fois elle sembla assez étonnée, sans pour autant être choquée… Ils était vraiment très différents tous les deux, par l'esprit, par le corps, par la façon dont ils voyaient les choses… Alors que l'elfe continuait à chercher même si elle ne se montrait pas aussi appliquée que son confrère, elle se permit de lui expliquer aussi son point de vue. Histoire qu'il ne reste pas dans le flou complet à son sujet…

-Le vouvoiement ne veut rien dire à mes yeux. Tu t'es expliqué et je saurai maintenant quel sens tu lui donnes mais c'est juste une convention. Respecter quelqu'un juste parce que c'est son aîné ou parce qu'il est du beau sexe, c'est du vent… Le respect se gagne ou s'offre au cas par cas… Le vrai j'entends, pas celui des convenances et de l'étiquette… Tu ne connais rien de mes expériences, ni de mon âge, ne te base pas sur cela pour estimer si je suis vraiment digne de respect car je ne le suis peut-être pas tant que cela...

Bien que cela aurait pu être le cas, il n'y avait aucune trace d'amertume ou d'agressivité dans sa façon de parler, au contraire. Elle avait parlé d'une voix douce et un peu éteinte, de celle qu'ont les gens un peu las… La jeune femme avait beau rejeter âge et expérience "supposés", elle faisait certainement plus vieille et sage que d'habitude en cet instant précis. La mage écouta le récit de la jeunesse de Charly, ne trahissant rien de ce qu'elle pouvait ressentir… Mais elle estima que ce jeune homme avait bien de la chance d'être parvenu à ce qu'il était aujourd'hui en restant à peu près intact…

-Tu vois… Je te respectais déjà pour ta réaction et ta facilité à venir jouer avec les enfants… Maintenant je te respecterai d'autant plus par rapport à ce que tu as subi plus jeune…

Et Charly comprit à cet instant que la jeune femme ne cautionnait absolument pas la façon dont il avait été traité enfant… Pas uniquement le fait que ses parents n'aient pas réussi à accepter son contrôle du feu mais aussi le rapport qu'ils avaient à lui au jour le jour. On ne battait pas un gamin parce qu'il n'avait pas fait le ménage… Elle eut un rapide sourire à son attention avant de retourner à ses recherches, observant un amoncellement de caisses qu'elle jaugeait du regard.

-Oh, j'ai toujours été une source de problèmes avant de rejoindre la Tour… Pas assez conventionnelle, jamais à faire ce que l'on attendait de moi, jamais là où l'on m'attendait, toujours à se fourrer dans les ennuis jusqu'au cou…

Sans crier gare la jeune femme escalada rapidement la pile de caisses instables avant de sauter pour atteindre le rebord du toit sur lequel elle se hissa à la force des bras, clairement habituée à faire cela… Elle disparu quelques instants avant que sa tête ne soit à nouveau visible, dépassant du toit, alors qu'elle tendait la main vers Charly.

-En fait mon arrivée à la Tour n'a absolument rien changé! Tu montes?