Et les voilà partis en mission, c’était presque un quotidien pour le chevalier. Parcourir le monde à courir après des fugitifs, des hommes et des femmes recherchés, des fois il ne s’agissait que de simple escorte ou comme à la rencontre avec la druidesse, donner quelques leçon aux apprentis. Malgré les risques et l’importance d’être bien préparer, Edalion apprécié suffisamment son quotidien, pour pouvoir souffler durant les voyages comme celui-ci. De temps en temps, il sifflait un air qu’il aimait bien, un petit souvenir d’une charmante soirée avec ses subordonnés. Une des femmes présente avait joué du violon sur un air gai, faisant tapoter les mains sur les tables et dont les paroles sortaient même de la bouche des gardes. Le chevalier ne participait que rarement à ce genre de soirée, pourtant c’est une ambiance qui a le don de le remettre sur pied mentalement. Oh, il ne fallait pas croire qu’Edalion aimait boire, ce n’était pas ça, pas ça du tout, c’est comme si il avait des années de sa vie à rattraper en dehors de son travail. D’ailleurs en regardant Létie essayant de chevaucher naturellement, il se demandait si elle était bonne musicienne ou danseuse, il espérait au moins meilleur que sa compétence de cavalière. C’est vrai ça, comment les druides faisaient pour se détendre ? Y avait-il un moment ou un autre ou ils se disaient qu’il fallait décompresser pour mieux avancer par la suite ? C’étaient des questions assez personnelles et qui n’avait pas lieu d’être posées à ce moment-là.

« Nous serrons arrivé dans trois semaines , à un moment, il faudra quitter les grandes routes afin d’éviter les embuscades et le pillage. »

Quelques temps après, après que les tentes étaient installées, le feu allumé et que le soleil s’était un peu éteint, pas complétement. Edalion s’était mis à la cuisine. Il fut fermier, gladiateur, assassin, guerrier et chevalier, mais il était aussi un cuisinier. Il tenait ce talent de sa défunte mère qui lui avait appris à mélanger les saveurs afin d’améliorer les vertus naturelles d’un repas. Sur le feu, il avait posé une poêle en fonte. Lourde, mais très résistant. Il prenait soin à éviter un maximum le gaspillage et savait doser la nourriture afin qu’une personne en a pas trop. Surtout en mission, il ne fallait pas se sentir ballonné et savoir manger sain et intelligemment. Savoir donner au corps ce dont il avait besoin au bon moment. Il était donc en train de préparer une émincée de viande blanche, de la volaille, des pommes de terre rôti et une macédoine de légume. Le tout dégageait une odeur appétissante pour le chevalier, mais il se demandait si une druidesse elfe mangeait comme lui. Alors sur le ton de l’amusement, il lui parla.

« Tu as déjà mangé ce genre de repas ? Je n n’aime pas bâclé un repas, même en mission, ma mère m’a toujours dis que celui qui veut vivre longtemps dois bien mangé, alors elle m’a appris quelques recettes. Il faut tout manger ! »

Même si il étouffa un rire, il venait de lui faire un compliment, un grand même. En gros il voulait qu’elle vive longtemps et qu’il était prêt à l’aider, mais ensuite une information vint lui trottait dans l’esprit. Les elfes vivent bien plus longtemps qu’un Homme. Lorsque lui sera sur son lit de mort, Létie sera encore dans son âge actif. Mais en tout cas, il tentera de faire d’elle une redoutable guerrière des forêts. Ca il pouvait le faire ! Vers la fin de la cuisson, Edalion jeta un coup d’œil sur le choix d’arme qu’avait choisi justement Létie.

« Pourquoi as-tu choisit ces armes-là ?

Ce n’était pas une question pour l’embêter, mais plutôt pour poursuivre son apprentissage, il fallait qu’elle sache quand utiliser quelle arme. Il avait également l’intention de lui apprendre les base du maniement des armes présentes. Tout continuant la conversation, il servit enfin le repas et tendit une assiette et un couvert à Létie.

Un arbre tord très lentement une de ses larges branches basses pour nous composer un siège et je le remercie d'une calme caresse. Les tentes sont montées et le feu grésille tranquillement. Le ronronnement de la rivière filant à travers les pierres... Tout est calme, reposant. Je regarde un long moment le chevalier penché sur sa cuisine. Étrange contraste avec l'homme d'arme plein de rancœurs qui avait quitté le fort, comme si la forêt étendait son atmosphère apaisante même sur cet être qui n'y appartenait pas vraiment. Mais qui suis-je pour savoir qui fait ou non partie de la douce complexité de mère nature ? Tous les hommes grandissent en son sein, seul ce qu'ils décident de faire de leur vie les en écarte. Mon maître a choisi la voie des armes, mais n'ai-je pas justement pris ce même chemin ? Suis-je pour autant séparée de mon attachement pour les arbres ? Quelques lames d'acier ne nous détachent pas de nos origines... Il faut bien plus qu'une séparation physique pour couper ce lien qui nous uni à la nature. Seules certaines sombres pensées peuvent nous en arracher. Le chevalier Edalion n'est pas de ceux qui renient les fondements de leur êtres, j'en suis certaines. Comment pourrait t-il, sinon, ressentir cette communion ? Je m'installe sur la branche, le regardant œuvrer, puis, alors que les mets si odorants bouillonnent doucement, je m'en vais à la rivière remplir quelques gourdes d'eau et les rapporte près du feu.

- Il y a bien longtemps que je n'ai pas pris le soin de vraiment préparer un repas. Je me nourris de ce que la nature veut bien m'offrir et elle a toujours pourvue à tous mes besoins. Mais je conçois qu'en temps de marche forcée il faille se nourrir autrement, prenant plus garde encore à conserver l’équilibre. Il nous reste encore de longues journées de chevauchée.

À nouveau assise sur ma branche, j'observe les chevaux qui restent étrangement proche du feu. Des bêtes de guerre n'ont pas peur des flammes. J'ai tout de même du mal à appréhender leur comportement, peut être parviendrais-je à monter convenablement cette belle jument quand je la comprendrais vraiment ? Ils sont allés à la rivière, puis sont revenus. Ils agissent un peu comme si ils étaient attacher, mais je n'ai jamais pu me résoudre à restreindre la liberté d'un animal. Étrange barrière morale... Je détache le regard de cette scène hypnotisant quand mon maître m'adresse à nouveau la parole. Pourquoi ces armes ? Parce qu'elles me paraissaient les plus appropriées. J'ai agit par instinct, n'ayant pas vraiment le temps de réfléchir puisqu'il fallait prendre la route rapidement, mais je peu néanmoins expliquer mes instincts. J'observe l’enchevêtrement de lames et de bois adossés à la tente quelques minutes, les yeux un peu vide. J'ai besoin d'un peu de temps, mon maître, de quelques longs instants pour me comprendre moi même. Ce bâton que je n'ai pas quitté depuis mon arrivée au château...

- Ce bâton est un lien qui me permet de me sentir toujours proche de dame nature. Je tire ma force, ma persévérance, des arbres qui aujourd'hui nous entour et j'aurai besoin de cette arme, tel un talisman, quand nous quitterons les terres bénies.

Je laisse glisser mon regard terne le long de la lame fine et élancée du fleuret. Celle ci... Peut être m'attirait t-elle plus qu'une simple épée tout en gardant la forme générale d'une arme de chevalier. Quelque chose dans ce fil si fin... Un détail que mon maître n'a pas manqué de remarquer... Je ne pense pas avoir fait une erreur, mais comment savoir avant d'avoir véritablement essayer ? Une lame si frêle doit aisément être brisée par une épée. Un choix qui peut s'avérer judicieux, pour peu qu'il soit manier avec beaucoup d'habileté, sans quoi il ne pourra jamais rivaliser avec la force brute d'une véritable épée.

- Ce fleuret pour menacer ou blesser si le besoin s'en fait ressentir. Le poids d'une épée comme la votre est trop important pour que je puisse la manier avec suffisamment de précision. Or, vous m'avez enseigner que ma chance de vaincre se situera en des points à peine plus gros que le bout de cette lame. Je n'ai nullement besoin de force si je touche une tempe de la pointe de cette arme.

Enfin, l'arc que j'ai déposé sur la selle de mon cheval. Un simple bois incurvé, quelques flèches... Pas grand chose en fin de compte. Seulement de quoi tuer un lapin. Est-ce pour cette raison que je l'ai choisi ? En partie. Nous aurons assez de vivres pour la trajet, le chevalier y a veillé, mais un peu de viande fraîche ne fait jamais grand mal. Quelques flèches... Bien peu. Il me faudra en refaire en chemin. De très simple, bois long fin et cassant à la pointe noircit au feu... Elle conviendront. Ce n'est pas une arme de guerre, mais du matériel de chasse même si il peut avoir d'autres utilisation. Je ne peux à chaque fois prendre la forme d'une chouette, mon maître risquerait de trouver cette forme gênante et j'aime garder quelques secrets pour moi, ne les utilisant que si ils sont vraiment nécessaire.

- Un arc car j'ai déjà par le passé manié une telle arme. Un simple matériel de chasse qui pourra également s'avérer efficace si la cible se trouve à distance. Il est rare de tuer d'une seule flèche, et je ne suis assurément pas assez douée pour y parvenir, mais ce bout de bois pourrait arrêter un ennemi le temps qu nous le rejoignons.

Je relève la tête, attendant tranquillement le verdict de mon maître. J'ai mis tant de temps à énoncer mes pensées que le repas est maintenant fin cuit.

Les deux commencèrent à manger. On voyait que les première bouché du chevalier, ou plutôt du cuisinier, n’était pas là pour la faim, ni pour l’envie, c’était pour jauger la nourriture. Le gout, qui devait être doux, savourant laissant la sauce poser une trace du passage de ce qu’il avalait. Il prit garde aussi à l’équilibre, bien que ce soit savoureux, il devait veiller à bien respecter les doses. Mais son analyse au bout de la troisième bouché se conclu par un sourire satisfaisant. Un peu de fierté s’en échappé, mais juste assez pour dire qu’il avait réussi le repas. Enfin pour lui, car la plus valeureuse récompense était ce même sourire, sur le visage de son écuyère. Ou des mimiques qui lui feraient comprendre qu’il a tout gagné sur ce repas.

Bien sûr, il avait écouté attentivement les réponses de Létie. Son bâton était ce qui la relié à la forêt. Un objet qui lui rappela à chaque instant d’où elle venait. Le chevalier Hélioz comprenait parfaitement ce genre d’attitude face à un objet qui peut sembler banal pour beaucoup d’autre. Autour du cou, le guerrier portait un pendentif, une petite plaque de métal en forme de bouclier rond, offert par son père, peut-être la dernière fois qu’il l’ai vu en vie. Instinctivement, il l’avait saisi lorsque la druidesse parla de son bâton, comme pour lui montrer qu’il avait compris et qu’avoir le bâton auprès d’elle n’était absolument pas gênant. Puis, il songea au fleuret, il était très satisfait d’elle, parce qu’elle avait pris en compte ses leçon du jour d’avant sur les points sensibles. Un fleuret invitait à les utiliser.

« Je suis heureux de constater que tu retiens mes instructions, c’est encourageant pour la suite. Pour le fleuret, la seule chose que tu ne dois jamais faire, c’est de contrer, ta lame est fine et précise. Une lame grossière qui cherche à briser viendra à bout de ton épée. Je t’entrainerais alors à dévier les attaques sans subir de choc. »

Edalion sortit son épée pour la présenter à Létie. Il s’agissait d’un sabre à la lame large et légèrement courbée. Une épée à une main moyennement lourde mais parfaitement équilibré.

« Sache qu’aucune arme est plus efficace qu’une autre, c’est son porteur qui fait d’elle une arme mortelle ou pas. Personnellement j’ai choisi cette épée car elle fausse les esprits, beaucoup pourraient croire qu’elle est lourde et donc lente, alors que si elle est parfaitement équilibré, le poids ne se ressent pas. C’est ainsi que je peux surprendre mes adversaires, en utilisant ma seconde main pour contre-attaquer. »

Le chevalier continua de manger, tout en restant concentré dans la conversation actuelle. Son épée il l’avait laissé près de Létie, l’invitant à la saisir et voir d’elle-même ce qu’il venait de dire. Pour l’arc, le chevalier était aussi totalement d’accord avec la druidesse, il ne s’agissait, dans l’immédiat, que d’un outil pour chasser, même si beaucoup de personnes s’en servent comme arme redoutable. Mais d’après les paroles de Létie, elle devait déjà être au courant de ce genre de chose. Edalion avait conscient qu’il avait une druidesse pour écuyère et non un futur chevalier. Il devait donc prendre en compte ce détail et respecter certaines valeurs de la forêt, qui après tout n’était pas si diffèrent. Mais ce détail peut aussi être un rempart contre l’ascension ultime pour être reconnu en tant que chevalier. Il préserverait à lui enseigner tout son savoir, mais il savait déjà qu’il ne pourrait pas faire d’elle son égal comme lui, ne pourrait jamais se plier entièrement à la cause des druides qu’il respectait tant.

La discussion autour des armes était intéressante. Edalion observait son élève prendre son épée et la lui rendre. Beaucoup disaient qu’un chevalier ne devait jamais se séparer de son arme ou de son armure qui est censé être une seconde peau. Dans ce cas-là, Edalion devait être une exception. Pour lui, la meilleure arme était l’esprit, sans lui, aucune arme ne peut atteindre son objectif. Quant à l’armure. Le corps devait être endurcit pour la remplace, bien sûr, elle n’égalerait jamais l’acier. Une armure était juste un moyen supplémentaire de se protéger face à un danger que son porteur n’aurait pas anticipé. Encore une fois, tout était une question d’état d’esprit. Puis, la conversation tourna autour de l’arc et du lance-pierre. Il était vrai qu’en tant que chasseur, le choix entre les deux ne faisait aucun doute, cependant, aussi ridicule que le lance-pierre puisse paraître, il avait son utilité.

« Personnellement, j’utiliserai le lance-pierre pour lancer, autre chose que des cailloux…des fioles de poisons, des tas d’objets qui se trouve autour du lanceur et comparé à un arc, les flèches, on ne les trouve pas éparpillées au sol. Et donc, je maintien, qu’aucune arme n’est meilleur que l’autre, tout dépend de son utilisateur. »

Puis, en duo, la vaisselle fut débarrassée, lavée et rangée. Le chevalier détestait le désordre, même dans sa vie personnelle. Chez lui, tout était rangé et propre. Son hygiène de vie était quasi irréprochable et il n’était pas question de laisser faire les corvées aux autres sous prétexte qu’il n’était pas seul. D’ailleurs, il remercia la druidesse de son aide d’un signe de la tête et d’un sourire amical. La suite promettait d’être tout aussi intriguant. Létie avait la soif d’apprendre et Edalion était bien décidé à lui fournir le savoir dont elle avait besoin. Le chevalier prit alors son épée en main et se mit en garde, il mima ses paroles tout en lui expliquant le principe, son principe.

« Dans l’immédiat, tu dois être mon miroir, recopie mes gestes, jusqu’à ce que tu as compris ce que je vais te dire. Avant chaque attaques, tu dois regarder, analyser, tu dois choisir ta cible, et ne plus la quitter de tes yeux, sans pour autant baisser ton attention sur ton entourage. Lorsque tu veux frapper, retiens, ces mouvements, Armer, chargé, frapper ! Arme ton arme vers ton adversaire, charge ton attaque pour lui donner de la puissance et garder ton équilibre, frappe avec un sentiment.

Le hasard n’a pas se place dans un combat, chaque coup ou parade doit être voulu et réfléchit. Si tu ne mets pas un sentiment dans ton attaque, ton arme sera morte et faible. Lorsque tu veux fendre un objet, tu dois le voir déjà fendu. A chaque fin de mouvement, revient en garde, tout en comprenant que ton arme est le prolongement de ton corps, ne le plie jamais, garde le rigide et vivant. Garde le contrôle de ton arme à chaque instant où elle te tuera. Tu as un fleuret, les bases restent les même. Tes estoques doivent être précis et vivant. »

Sur cette dernière phrase, le chevalier émit un cri puissant pendant une frappe plus puissante encore, dirigé vers le cou de Létie. La lame alors très rapide vint s’arrêter à quelques millimètre de la peau de la druidesse et la retira tout de suite. C’était surtout pour lui montrer qu’elle pouvait compter sur lui et lui faire confiance. Il s’éloigna un peu d’elle la regardant faire, et attendit des questions ou des commentaires sur ce qu’il venait de lui enseigner.

Quête échouée